Des soldats ukrainiens tentent de baisser un canon en direction de Bakhmout (oblast de Donetsk), le 5 avril 2023. | Diego Herrera Carcedo / Anadolu Agency / Anadolu Agency via AFP
Des soldats ukrainiens tentent de baisser un canon en direction de Bakhmout (oblast de Donetsk), le 5 avril 2023. | Diego Herrera Carcedo / Anadolu Agency / Anadolu Agency via AFP

Les gros doutes du Pentagone quant à la contre-offensive ukrainienne

L'un des enseignements les plus troublants de la récente fuite de documents.

Le 5 avril est apparue, dans un recoin perdu de l'internet et après un drôle de cheminement, une masse de documents classifiés et hautement sensibles issus directement des hautes sphères américaines de décision, en particulier des services du Pentagone.

Depuis, ce dernier met les bouchées doubles pour comprendre comment des dossiers si importants ont pu quitter ses installations et leur secret, et pour tenter de réparer les dégâts considérables que de telles fuites ont pu provoquer chez les alliés des États-Unis –la Corée du Sud a par exemple peu apprécié le fait d'avoir été observée de si près.

Secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin s'est ainsi senti obligé, en écho à son homologue ukrainien Oleksiy Reznikov, de réaffirmer que Kiev conservait, malgré ces leaks, une pleine et entière confiance dans ses plans futurs et quasi immédiats: ceux d'une vaste contre-attaque annoncée depuis des mois. «Nous resterons concentrés sur notre aide à l'Ukraine pour qu'elle parvienne à rencontrer le succès, quel que soit le moment où elle choisit de lancer de telles opérations», a-t-il ajouté, comme le précise un article du Wall Street Journal.

Une manière, peut-être, de jeter un peu d'eau sur l'incendie. Car dans ces fameux documents ayant fuité, et complètement à rebours du discours tenu en public, le Pentagone semblait très sérieusement douter de la capacité de l'Ukraine à reprendre beaucoup de terrain lors de sa contre-attaque, explique le Washington Post.

Les plans étudiés –qui ne sont sans doute pas l'unique solution envisagée par Kiev– se concentrent sur la destruction du pont de Crimée, également nommé pont de Kertch, vital pour le ravitaillement russe d'une péninsule désormais hérissée de fortifications.

A priori produit par le bureau du directeur du renseignement, avec l'appui de moyens humains de la CIA, le document américain estimait, fin février –à la date de sa rédaction supposée–, que l'Ukraine souffrait de «déficiences persistantes au niveau de la formation» et que «les réserves de munitions [allaient] probablement mettre à rude épreuve tout progrès et aggraver les pertes durant l’offensive». Avec le risque que son offensive ne débouche que sur de modestes gains territoriaux, «bien en deçà» des objectifs de Kiev.

Selon le Washington Post, un autre document issu du National Intelligence Council, et arrivant à des conclusions similaires, a également circulé dans les hautes sphères américaines.

Le pire contre-attaque

Des discussions au plus haut niveau entre les gradés américains, y compris Lloyd Austin et le chef d'état-major Mark A. Milley, et leurs homologues ukrainiens auraient aussi eu lieu ces dernières semaines pour s'assurer que Kiev ne visait pas trop haut, et que ses ambitions correspondaient bien à ses moyens.

Une source du journal américain affirme en outre que des simulations ont été effectuées avec des hauts gradés ukrainiens pour déterminer l'issue de différents scénarios et estimer le risque d'un trop grand étalement des forces en jaune et bleu disponibles au moment de la contre-attaque.

Depuis, certains officiels ukrainiens n'ont pas cherché à nier les difficultés potentielles d'une telle stratégie. «Tout le monde sait que nous n'avons pas beaucoup de munitions, le président et le ministre de la Défense ne cessent d'en parler», commente l'un d'eux, qui met l'accent sur la lenteur de l'arrivée des matériels modernes promis par l'Occident. Anciennes ou plus récentes, comme sa logique mais problématique grande consommation de munitions pour systèmes antiaériens, les faiblesses de l'Ukraine sont en effet connues, notamment par le commandement du pays lui-même en premier lieu.

«Il est aussi évident pour tout le monde depuis novembre que la prochaine contre-offensive sera centrée sur le sud, d'abord Melitopol, puis Berdiansk. Mais l'endroit exact, ça, on peut le changer la semaine [précédant l'offensive]», poursuit la même source.

Il faudra beaucoup d'intelligence et plus de souplesse stratégique, tactique et opérative encore pour que Kiev réussisse son pari, et le président Volodymyr Zelensky a d'ailleurs laissé entendre que les plans du pays avaient déjà évolué depuis la fuite du Pentagone. Mais l'on sait désormais d'expérience que l'Ukraine a largement de quoi surprendre le monde.

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