Le 30 décembre 2020, les dirigeants de l'Union européenne et Boris Johnson affichaient un grand sourire à la signature de l'accord du Brexit.
Le Premier ministre britannique déclarait que le Royaume-Uni serait «le meilleur ami et allié que l'UE puisse avoir». Deux mois plus tard, l'entente cordiale tourne au vinaigre, à l'occasion d'une campagne de vaccination faisant ressurgir de vieilles rancœurs.
Mercredi 17 mars, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a pointé du doigt le Royaume-Uni en l'accusant de pratiquer la rétention de doses de vaccins promises à l'Europe.
«Nous voulons de la réciprocité et de la proportionnalité dans les exportations, et nous sommes prêts à recourir à toutes les options [...] pour nous assurer que l'Europe reçoive sa juste part», a-t-elle averti lors d'une conférence de presse.
L'UE menace tout bonnement d'interdire les exportations de vaccins à destination du voisin d'outre-Manche, une mesure déjà appliquée par l'Italie le 5 mars dernier pour une livraison vers l'Australie.
De quoi provoquer la fureur des Britanniques, qui dépendent des usines européennes pour un tiers de leurs vaccins. Le ministre des Affaires étrangères Dominic Raab a accusé la Commission de «brigandage», relevant qu'un tel traitement était d'habitude réservé «à des régimes moins démocratiques que le nôtre».
Entente discordiale
De leur côté, les Européens se plaisent à jeter de l'huile sur le feu, von der Leyen n'ayant même pas daigné répondre aux questions des journalistes britanniques lors de sa conférence de presse. Certains médias anglais ont même vu dans la suspension du vaccin AstraZeneca une sorte de «vengeance» envers le Royaume-Uni pour miner la confiance envers son vaccin.
Cette histoire vient s'ajouter à une longue liste de contentieux entre le bloc européen et son voisin. Le 15 mars dernier, la Commission européenne a lancé deux procédures pour violation de l'accord de Brexit après la décision de Londres de reporter les contrôles douaniers en Irlande du Nord destinés à protéger le marché européen.
L'initiative a d'autant plus vexé Bruxelles que Boris Johnson avait déjà voté unilatéralement en septembre un projet de loi permettant de détricoter l'accord alors en négociation avec l'Europe.
En janvier, le Royaume-Uni a refusé d'accorder à l'envoyé de l'UE à Londres un statut diplomatique, ce qui a entraîné en représailles le gel de l'entrée en fonction de son ambassadeur à Bruxelles.
Les relations commerciales se sont également considérablement distendues en raison de la crise du Covid et des nouvelles tracasseries administratives imposées aux exportateurs européens et britanniques.
La relation entre les deux camps «est très dysfonctionnelle et les canaux de négociation sont rompus», soupire Mujtaba Rahman, un consultant du cabinet de conseil Eurasia Group. Nul doute qu'un autre sujet de brouille va bientôt surgir. On ne saurait se passer d'un bon punching-ball.