Confinées entre les quatre murs claustrogènes de leur logis dans une grande métropole quelconque, des millions de personnes rêvent sans doute des conditions de l'enfermement imposé à Daniel Ordoñez.
Comme dans une version de Shining, sans la folie, les jumelles, la neige ou la hache mais avec une vue imparable sur la Méditerranée bordant doucement Barcelone, l'Espagnol est l'unique occupant de l'emblématique et luxueux W Hotel de la ville.
S'étant choisi une vaste chambre au 24e étage de ce bâtiment surnommé «la Voile» et dessiné par Ricardo Bofill, Ordoñez a pour mission de maintenir la structure en état pour lui permettre de rouvrir aussi rapidement que possible une fois le déconfinement espagnol entamé.
Tous les cinq jours, il doit ouvrir les 1.400 robinets que l'hôtel comprend, et ce pendant cinq minutes chacun, afin d'éviter que le réseau d'eau ne soit contaminé par la légionellose. La tâche lui prend une journée entière et constitue «la partie la plus ennuyeuse de mon job», concède-t-il au New York Times.
Chambre avec vue
Daniel Ordoñez pensait initialement rester deux semaines dans cet hôtel fermé, comme tous les autres en Espagne, sur décision de l'État. Sans qu'il ne sâche encore quand il sera libéré, cela fait désormais huit semaines qu'il erre dans cet infini dédale de couloirs déserts et de salles dépeuplées.
Contrairement au Jack Torrance de Shining, lui ne semble pas sombrer dans la furie. «Ça a d'abord été un peu étrange de voir mes quelque chaussettes tourner dans les immenses machines à laver de l'hôtel, mais j'ai eu le temps de m'y habituer», témoigne-t-il auprès du quotidien new-yorkais.
Le journal note en outre que la situation du Catalan met l'accent sur une question beaucoup plus large, cruciale pour l'économie du pays comme pour celle de tous ceux pour lesquels le tourisme est l'un des pilliers de la richesse nationale.
Le W Hotel n'est ainsi qu'un exemple: en sus du coup dur porté à l'intégralité du secteur, maintenir des infrastructures touristiques en état de pouvoir reprendre leurs activités une fois la pandémie maîtrisée est, partout, un enjeu complexe.