Qassam al-Urduni et Bilal al-Sanaani n'avaient aucune chance de s'en sortir. Dimanche 14 juin, ces deux commandants de Tanzim Hurras ad-Din, un groupe syrien affilié à Al-Qaïda, sont décédés à la suite d'une frappe de drone sur leur véhicule, dans la province d'Idleb.
Les images ne montrent aucune explosion, ce qui indique qu'un missile Hellfire R9X a probablement été utilisé. Il s'agit d'une variante du Hellfire AGM-114, qui tranche ses cibles en morceaux au lieu de détoner.
Le Wall Street Journal a dévoilé l'existence de cette arme, surnommée «Ginsu volant» ou «bombe ninja», en mai 2019. «Plutôt que d'embarquer une charge explosive, l'ogive cinétique contient [quatre] lames qui se déploient juste avant l'impact et éviscèrent efficacement une cible, sans [faire] les victimes civiles potentielles d'une explosion importante», explique froidement Task & Purpose.
Assassinats ciblés
L'objectif affiché du Hellfire R9X consiste à diminuer les dommages collatéraux lors des assassinats ciblés de chefs djihadistes. Depuis 2017, pour ce type d'opérations, les États-Unis ont de plus en plus recours à cette «arme non explosive qui peut être décrite comme un couteau à cran d'arrêt volant de 45 kilos ou une enclume recouverte d'épées», notamment en Syrie et au Yémen.
NEW - @WSJ confirms the @CIA & @DeptofDefense have a new "secret" missile - the R9X, or "flying Ginsu" - which kills a selected target with 6 blades, but no explosive payload.
— Charles Lister (@Charles_Lister) May 9, 2019
-- "To the targeted person, it's as if a speeding anvil fell from the sky."https://t.co/DIQfnfJYDq pic.twitter.com/iM87WUFLhg
Ahmad Hasan Abou Khayr al-Masri, alors numéro 2 d'Al-Qaïda en Syrie, a été éliminé en février 2017 à Idleb par un Hellfire R9X. Abou Ahmed al-Jaziri, un combattant étranger d'Hayat Tahrir al-Cham, scission d'Al-Qaïda en Syrie et groupe armé le plus influent à Idleb, a été tué en décembre 2019 par la même arme.
Le missile semble avoir également servi en Afghanistan en janvier 2019, contre un individu soupçonné d'être un commandant taliban, dans la province de Kondoz.
L'utilisation du Hellfire R9X limite indéniablement les risques de faire des victimes civiles lors d'une frappe de drone. En revanche, la politique d'assassinats ciblés des États-Unis –comme celle de la France– continue de poser question.
«L'assassinat ciblé a pu être présenté comme un progrès moral, dans le sens où il entend tuer des personnes responsables. [...] Quelles sont les garanties juridiques et démocratiques que l'on peut apporter à ces pratiques? Qui établit la kill list des ennemis à abattre ?», interroge la chercheuse Amélie Férey, autrice d'Assassinats ciblés – Critique du libéralisme armé.