Comme les smartphones, les voitures sont désormais des produits infinis. | Volkswagen
Comme les smartphones, les voitures sont désormais des produits infinis. | Volkswagen

L'électrification de Volkswagen est un cauchemar logiciel

De l'auto à la tech, un grand saut que le constructeur allemand n'a pas encore réussi.

En mai 2022, le patron du groupe Volkswagen, Herbert Diess, expliquait aux habitants de Wolfsburg (Basse-Saxe) que, pour une firme comme celle qu'il dirigeait alors, le véritable défi à relever n'était pas la transition vers des motorisations électriques, mais la transformation logicielle qui devait nécessairement l'accompagner.

Il ne croyait pas si bien dire. Quelques mois plus tard, le réputé peu amène Herbert Diess était mis de côté au profit d'Oliver Blume, patron de Porsche choisi pour «pacifier» le géant automobile allemand.

Son management décrit comme brutal n'était néanmoins pas seul en cause dans cette mise à l'écart: pour nombre d'observateurs, c'est l'échec de cet admirateur d'Elon Musk à faire de Volkswagen une grande puissance logicielle, une firme tech, qui lui a coûté son poste.

Car comme l'explique notamment Bloomberg, les bugs dont souffrent les premiers véhicules électriques de la firme la placent loin derrière son évident concurrent Tesla dans le domaine et créent des légions d'utilisateurs mécontents.

Les systèmes plantent constamment, jusqu'à se briquer et devenir totalement inutile. Les écrans qui constellent les voitures modernes de l'allemand deviennent fous. Les systèmes d'infotainment mis à disposition ne sont pas finis.

Nécessaires aux véhicules, parfois indispensables en matière de sécurité, les mises à jour logicielles ne peuvent être faites à distance comme cela devrait être le cas, mais obligent leurs possesseurs à passer par le garage et y déposer longuement leurs engins.

Plus grave, les ID se mettent à freiner brutalement en reconnaissant mal un signe routier, ce qui pousse les acheteurs de véhicules dotés de l'option à la désactiver tout à fait.

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«C'est une maladie qui se diffuse, cingle auprès Bloomberg Jake Fisher, patron du très influent testeur de voitures Consumer Reports. Je parle de systèmes qui, quand on sait les utiliser, nécessitent de passer par plusieurs manœuvres quand tout se faisait auparavant avec un seul bouton, et c'est honteux. Ça va dans le mauvais sens et ça rend les voitures plus mauvaises.»

«Terrible», dit le possesseur d'un ID.4 auprès du site américain à propos du système logiciel de son engin, qu'il décrit pourtant comme réussi sur le plan mécanique. «Heureusement, il y a Apple CarPlay. Sans cela, sincèrement, je revendrais la voiture pour prendre une Tesla.»

Un autre possesseur d'ID.4 explique que la promesse lorsqu'il a acquis son véhicule était une mise à jour logicielle tous les trois mois, un rythme largement dépassé par Tesla, très réactif dans le domaine. En vingt mois, il n'y en a eu que deux: c'est peu pour des machines qui, contrairement aux produits finis du passé, sont supposées progresser tout au long de leur vie.

Une conductrice de VTC se plaint quant à elle des mauvaises notes laissées par sa clientèle, à qui elle doit régulièrement demander de chercher le trajet sur leur propre smartphone, le GPS de sa ID.4 tombant souvent en rade.

Pourtant, pour accompagner les très grandes ambitions électriques du groupe Volkswagen, elles-mêmes poussée par la décision européenne de bannir les moteurs à combustion neufs à partir de 2035, des moyens colossaux ont été mis sur la table.

Une unité de développement informatique de grande ampleur a été créée dès 2016, et renommé Cariad en mars 2021. «Le plan de Herbert Diess pour battre Tesla reposait sur le remplacement des mains calleuses d'ouvriers par les doigts délicats de 10.000 ingénieurs en informatique, qui transformerait Volkswagen en une firme tech», écrit Bloomberg.

L'échec est complet et, comme l'explique The Register, l'ambiance au sein de l'unité dirigée par Herbert Diess est déplorable. Un rapport interne commandé à McKinsey décrivait une structure de décision inefficace, pour des coûts ne cessant d'exploser.

En sus des bugs déjà décrits, qui ont notamment plombé le lancement de la ligne ID, l'incapacité de Cariad à fournir des logiciels de qualité pousse le groupe à décaler des modèles importants; la Porsche Macan, la ligne Artemis d'Audi, la première Bentley électrique.

Oliver Blume aura donc fort à faire dans les prochains mois et prochaines années s'il souhaite que Volkswagen rattrape son retard sur la concurrence moderne –y compris les jeunes pousses chinoises, que nombre d'experts estiment en avance en matière électrique et logicielle. «Il est normal que la construction d'une entreprise soit un processus onéreux, a-t-il expliqué sur le site officiel du constructeur allemand. Nous allons tout passer en revue avec un esprit ouvert, et implémenter rapidement un plan.»

Quant à Elon Musk, c'est comme à son habitude sur Twitter qu'il a réagi aux déboires de Herbert Diess: «Le logiciel est la clé pour le futur», a-t-il affirmé quand on lui a demandé de réagir sur la mise à l'écart de l'allemand. Pour l'instant, le futur ne semble donc pas appartenir à Volkswagen.

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