«La batterie de stockage est une escroquerie, affirmait Thomas Edison en 1883. Après plusieurs charges, son efficacité commence à baisser.» Pourtant, les progrès dans ce domaine ont, depuis, été considérables.
Alors que du temps de l'ingénieur, l'autonomie des batteries des voitures n'était que de 4 miles (soit environ 6,4 km), elle s'élevait, dans les années 1990, à 70 miles (environ 112,6 km) pour l'EV1 de 137 chevaux de General Motors. Elle peut désormais atteindre les 375 miles (environ 603,5 km) pour la Tesla Model S et plus encore pour la Mercedes EQS.
Le progrès technologique ne compte pas s'arrêter en si bon chemin: la future génération de batteries sera certainement plus puissante, plus durable, plus autonome, plus abordable et demandera moins de matériaux rares et toxiques comme le cobalt, le lithium ou le nickel.
Si cela peut sembler ambitieux, les constructeurs se disent confiants et croient à la technologie actuelle lithium-ion, grâce à l'usage de matériaux tels que les anodes au silicium ou lithium-métal et l'électrolyte solide.
Mais, alors même que le secteur est si prometteur, certains investisseurs sont désorientés, car il est très difficile de comparer les différentes technologies entre elles. La raison: il n'existe aucun critère de performance standardisé.
Un manque d'objectivité
Concernant les batteries, les progrès se font souvent au détriment d'autres. Par exemple, une plus grande autonomie signifie un temps de charge plus long (et inversement), sachant que le temps de charge lui-même affecte également la durée de vie du cycle.
Selon Qichao Hu, PDG de la société de batterie SES AI, le plus gros problème est qu'il y a beaucoup de fausses annonces dans cette industrie. «Nous avons besoin de critères objectifs, qui permettraient à tout le monde d'avoir un regard objectif afin de prendre des décisions éclairées», affirme-t-il à Bloomberg.
Comme la conception de batteries est très coûteuse, certains groupes font leurs tests eux-mêmes, n'ayant pas l'argent pour créer une installation pilote, ce qui fait qu'ils ont un plus grand contrôle sur les résultats. De plus, les tests peuvent avoir lieux dans différentes conditions. Or, une batterie qui fonctionne bien à 45°C peut ne pas aussi bien marcher à des températures normales.
Bien que la mise en place de normes ne soit pour l'instant pas sérieusement envisagée, quelques idées émergent. Le Bureau des technologies des véhicules du département américain de l'Énergie demande par exemple aux entreprises de fournir des comptes rendus de leurs progrès techniques.
Seulement, toutes ne s'y plient pas, et lorsqu'elles le font, ces comptes rendus présentés sous différents formats. Aussi, en 2021, le Consortium fédéral pour les batteries avancées a publié un ensemble de protocoles de tests, mais ceux-ci ne couvrent pas des batteries entières, uniquement des cellules.
Certaines revues académiques comme Nature Energy ont quant à elles façonné une liste de contrôles expérimentaux que les chercheurs doivent accomplir avant d'être publiés. «Cela a été spécifiquement créé pour répondre au fait qu'il est facile de présenter des performances comme meilleures qu'elles ne le sont en réalité», explique Alec Talin, un scientifique de Livermore (Californie).
Les investisseurs se doivent donc de rester méfiants. «Les entreprises peuvent induire en erreur de différentes manières, détaille Steve Harris, du laboratoire national Lawrence-Berkeley. Vous sélectionnez des données qui vous font paraître sous un bon jour. Vous ne fournissez aucune information critique. Vous présentez les performances [du produit] dans des conditions idéales. En d'autres termes, comme disait Edison, vous escroquez.»