Une poignée d'irréductibles pilotes résiste, encore et toujours, à l'envahisseur. | Genya Savilov / AFP
Une poignée d'irréductibles pilotes résiste, encore et toujours, à l'envahisseur. | Genya Savilov / AFP

Pièges, secrets et «dogfights»: comment les pilotes ukrainiens résistent à la Russie

Contre toute attente, ils tiennent encore.

Personne ne s'attendait à la résistance des armées ukrainiennes face à l'armée russe, cet ogre qui n'allait faire qu'une bouchée, en quelques heures, du pays qu'il envahissait. Un mois plus tard pourtant, malgré d'innombrables victimes et des dégâts considérables, l'Ukraine, son peuple et ses troupes tiennent encore le pays.

Plus surprenant encore, étant donné le déséquilibre entre les armées de l'air des deux nations, la Russie n'a jamais réussi à imposer une véritable supériorité aérienne aux cieux ukrainiens, qu'une poignée d'irréductibles pilotes, dans de vieillissants aéronefs, continuent de sillonner bravement.

L'un de ces pilotes, nommé Andriy, a accepté de décrire son quotidien au New York Times, qui en profite pour explorer quelques-unes des forces de cette armée de l'air que l'on imaginait condamnée en quelques heures.

Le quotidien américain explique que les avions ukrainiens et leurs pilotes opèrent dans un secret relatif, œuvrant depuis des bases dans l'ouest du pays –ou ce qu'il en reste après destruction partielle par des bombardements russes.

Les avions sont même capables de décoller et d'atterrir, au besoin, depuis des portions d'autoroute. Les pilotes ont été entraînés à ces conditions bancales, comme le montre la vidéo ci-dessous, dénichée par The Drive.

Dans un hangar discret, Andriy attend fébrilement que son supérieur lui crie subitement de prendre les airs, pour une mission qui ne lui est généralement pas encore connue. «Je ne vérifie rien, raconte-t-il au NYT. Je décolle et c'est tout.»

Sans doute le fait-il avec un peu d'appréhension, sinon beaucoup d'une trouille légitime: l'armée de l'air russe dispose de beaucoup plus d'avions comme de pilotes, effectue bien plus de sorties chaque jour (200 contre 5 à 10, selon le quotidien américain), et nombre de ses camarades sont déjà tombés au combat.

Dans un monde de radars et missiles à longue portée où les dogfights, ces combats aériens au près et à l'ancienne, sont devenus une chose plutôt rare, Andriy sait qu'il décolle à chaque fois pour se battre, en face à face et œil pour œil.

«À chaque fois que je sors, c'est pour un vrai combat», dit le jeune homme de 25 ans, qui préfère n'appeler sa femme et ses enfants qu'au retour de sa mission, jamais avant. «À chaque combat contre des jets russes, il n'y a pas d'égalité. Ils sont toujours cinq fois plus nombreux.»

La bataille d'Angleterre d'Ukraine

Comment donc les forces aériennes ukrainiennes ont-elles réussi à rester en vie et, surtout, à infliger de tels dégâts à leurs homologues russes? Les autorités militaires de Kiev parlent de quatre-vingt-dix-sept avions abattus depuis le début de la guerre, certains en vol, d'autres au sol, les avions ukrainiens étant également parfois chargés de détruire en vol des missiles de croisière.

Le chiffre est sans doute surévalué, mais les spécialistes de l'OSINT (open source intelligence, le renseignement en source ouverte) ne cessent d'identifier formellement, chaque jour, de nouvelles carcasses de MiG-29, Su-25, Su-34 ou hélicoptères russes tombés au combat: comme pour les blindés, comme pour les troupes à pied, les pertes en matériel et personnel aérien sont énormes du côté russe.

Yuriy Ihnat, porte-parole de l'armée de l'air ukrainienne, avance que l'efficacité de ses avions et pilotes tient aux tactiques et subterfuges utilisés pour piéger les avions russes et leurs pilotes.

Le succès commence au sol, collectivement, et parfois avec l'appui des populations civiles: dans une réminiscence de la bataille d'Angleterre, le New York Times explique que des réseaux se sont mis en place pour communiquer la présence d'aéronefs ennemis, leur cap, leur vitesse estimée, leur altitude, leur armement, leur formation.

Les pilotes ukrainiens, eux, jouent souvent le rôle de leurres et d'appâts: ils doivent attirer leurs ennemis russes dans les filets hérissés des défenses antiaériennes du pays, qui n'ont pas encore tout à fait été réduites au silence et dont l'utilisation tactique ne cesse d'épater observateurs et stratèges occidentaux.

Les combats se font désormais surtout de nuit, explique Andriy, des pilotes russes échaudés par les lourdes pertes des premiers jours redoutant désormais une trop grande visibilité diurne. «Ma tâche principale est de toucher des cibles en vol, décrit-il. J'attends que mon missile accroche sa cible. Et ensuite j'appuie sur la gâchette.»

Dit comme ça, cela semble simple. Bien sûr, ça ne l'est pourtant jamais. «J'ai connu des situations où j'étais en approche d'un avion russe pour le descendre. Je pouvais déjà le détecter, mais je devais attendre que mon missile accroche. Au même moment, le sol m'informait qu'on m'avait par ailleurs aussi tiré dessus.»

Habiles manœuvres évasives et leurres ou contremesures électroniques sont dans ces cas limites ses deux seules garanties de survie. «Tout dépend de la distance et du type de missile qui a été tiré en ma direction», détaille le pilote. «C'est une grande décharge d'adrénaline à chaque fois, car un vol est un vol», conclut celui qui a appris son métier à l'académie de Kharkiv, pensant alors que jamais il n'aurait à faire la guerre.

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