Malgré ses succès commerciaux réguliers et son adoption par de nombreuses forces aériennes, signe de la puissance commerciale de la machine militaire américaine, il est difficile d'ignorer les affres que traverse, depuis sa naissance, le coûteux programme du F-35.
Pensé pour offrir un successeur à l'omniprésent F-16, soit un aéronef multirôle, simple, efficace et peu cher, le F-35 accumule depuis des années des défauts parfois rédhibitoires.
Problèmes de visée, trouille de la foudre, risques pour la santé des pilotes, coûts d'entretien élevés, l'avion a même reçu une évaluation très sévère du Pentagone lui-même qui, en 2020, a dénombré pas moins de 871 écueils.
Plus récemment, ce sont des problèmes techniques et des soucis d'approvisionnement qui ont affecté le réacteur de cet engin décidément maudit.
Jusqu'à il y a peu, l'avion à près de 1.000 milliards de dollars restait malgré tout officiellement la colonne vertébrale de l'US Air Force, qui a passé commande de près de 1.763 exemplaires du F-35A. Mais les pépins lassent le haut commandement et, logiquement, le vent semble tourner.
Digital Century Series
Fin 2020, Aviation Week rapportait ainsi que l'US Air Force, qui a déjà fait du neuf avec du vieux en modernisant ses vénérables F-15, souhaitait drastiquement revoir à la baisse le nombre de F-35 commandés (1.050) et se doter de F-16 remis au goût du jour.
Second round mi-février, et signal clair de la possible disgrâce du F-35, avec une sortie remarquée du général Charles Q. Brown. Chef d'état-major de l'US Air Force, Brown a annoncé souhaiter que l'armée dont il a la charge, dans un avenir proche, «reparte d'une feuille blanche» afin de s'équiper d'un tout nouvel avion.
Il a clairement désigné cet aéronef futur comme un successeur simple, peu coûteux et plus rapide du F-16: précisément ce que fut le très dispendieux et hautement complexe F-35, que cette concurrence low cost pourrait laisser sur le carreau.
Il y a quelques mois, la même US Air Force stupéfiait déjà le monde en annonçant avoir fait concevoir et tester un nouveau chasseur en douze mois seulement, par un constructeur n'ayant pas été nommé. Ce «F-X» inédit, dont on ne sait que peu de choses, fait partie d'un programme nommé Next Generation Air Dominance (NGAD).
Le concept du programme est d'accélérer grandement l'utilisation des techniques modernes d'ingénierie numérique. Plutôt que de passer des décennies à concevoir des avions destinés à durer un demi-siècle, au risque de les voir rapidement inadaptés aux évolutions stratégiques du monde, l'objectif de cette Digital Century Series est de pouvoir concevoir et mettre en service, en quelques années seulement, des engins collant parfaitement aux besoins changeants du moment.
Le nouvel avion –voire les nouveaux avions, créés ou modifiés au gré des besoins– que le général Brown appelle de ses vœux s'intégrerait ainsi au «mix» de plus en plus complexe de l'US Air Force, auquel viendront également se mêler les avions sans pilote et drones divers sur lesquels le Pentagone travaille activement.
Quelle place restera-t-il alors pour le F-35, son prix astronomique et sa montagne de défauts? Elle ne sera pas nulle, car le programme doit être payé, mais semble néanmoins vouée à un sacré rétrécissement.