Il y a quelque temps, nous évoquions l'a priori étrange mais finalement très puissante idée de transformer les immenses réserves d'avions de combat américains en une armée d'aéronefs zombies, afin de noyer d'éventuels ennemis sous des hordes d'adversaires relativement peu coûteux et, parce qu'ils ne sont pilotés par aucun humain, infiniment plus dispensables qu'un F-35.
Plus récemment, et sans compter bien sûr toutes les avancées faites ces dernières années par les drones militaires, américains ou d'ailleurs, l'US Air Force annonçait réfléchir à la création d'une flotte de gros-porteurs autonomes, capables d'aller d'un point A à un point B sans qu'aucun humain n'ait à toucher le moindre bouton ou tenir le moindre manche.
Tout ceci tient à une chose: les progrès que peuvent faire les intelligences artificielles chargées de maintenir ces appareils en vol, de les faire décoller, de les faire atterrir et, le cas échéant, de les faire se battre contre d'autres aéronefs.
C'est l'objectif du X-62A «Vista» de Lockheed Martin, et plus précisément de sa fameuse division expérimentale Skunk Works: être une plateforme de développement et de tests pour les systèmes du futur. L'appareil est d'ailleurs lié aux destinées d'un tout autre programmé nommé «Skyborg», mais ses formes le rendent aisément reconnaissable.
Basé à l'Edwards Air Force Base en Californie, le X-62A (anciennement NF-16A) est un bon vieux F-16 qui a été transformé pour être piloté par un robot algorithmique, et qui semble faire de très rapides progrès. L'appareil désormais devenu vital aux intérêts militaires américains a ainsi battu en décembre dernier un joli record qui en dit long sur la vitesse de son apprentissage.
Petit à petit, voir grand
Selon l'US Air Force et comme le rapporte notamment Ars Technica, le Vista (pour «Variable In-flight Simulation Test Aircraft») a ainsi volé pendant dix-sept heures en étant piloté par des intelligences artificielles, une sortie lors de laquelle des «manœuvres avancées de combat» et des «engagements au-delà du champ visuel» ont été effectués.
Pour ce faire, et ainsi que le détaille Interesting Engineering, l'appareil est doté de multiples systèmes qui, en travaillant de concert, lui permettent de se passer de l'intervention d'un pilote pour l'ensemble des tâches lui étant habituellement allouées. Le «VISTA Simulation System» (VSS) fourni par la firme Calspan ou les «Model Following Algorithm» (MFA) et «System for Autonomous Control of the Simulation» (SACS) de Lockheed Martin font partie de ces robots.
Pendant les dix-sept heures de test, un pilote humain reste néanmoins présent dans le cockpit, prêt à prendre les commandes en cas de souci –ce qu'il n'a semble-t-il pas eu à faire. Ces tests en vol sont notamment utiles pour confirmer, en conditions réelles, ce que les simulations informatiques et intelligences artificielles prévoyaient dans leur monde virtuel.
«Après avoir entraîné nos agents autonomes pilotés par une IA, en utilisant des modélisations et des simulations informatiques de haut niveau, il est critique que nous les fassions voler, afin de valider les différences entre la simulation et le vol réel, a expliqué un officiel du projet. Disposer d'un aéronef comme le X-62A Vista est critique pour pouvoir effectuer des tests rapides de ces comportements automatisés.»
Avec cette méthode incrémentale, l'avion vole, ses systèmes automatisés sont testés et peuvent être adaptés en quelques heures aux contraintes du monde réel dès qu'un problème semble se poser. Le X-62A peut alors repartir, afin de tester les changements effectués dans ses logiciels et systèmes.