Les services de renseignement occidentaux, qui devraient rapidement pouvoir l'examiner sous toutes ses soudures, peuvent se réjouir: les forces armées ukrainiennes ont mis la main dans les environs de Kiev sur un élément d'un Krasukha-4, l'un des dispositifs de guerre électronique (electronic warfare en anglais, ou EW) les plus avancés et précieux de l'armée russe.
#Ukraine: We managed to identify this bizarre "container", captured today by the UA forces near #Kyiv.
— 🇺🇦 Ukraine Weapons Tracker (@UAWeapons) March 22, 2022
It is likely to be the command post of one of the most potent Russian EW system - 1RL257 Krasukha-4, used to suppress AWACS radars & radar reconnaissance satellites. pic.twitter.com/1VvKjGoM2p
Conçu et construit par la firme KRET (Concern Radio-Electronic Technologies), possession de l'État russe et de son bras industriel armé Rostec, le Krasukha-4 est généralement constitué de deux éléments, transportés sur de gros camions militaires: un poste de commande et une partie regroupant toute la précieuse électronique de la chose.
Précieuse, elle l'est assurément. Élément-clé de la guerre électronique russe, la machine crée autour d'elle une bulle protectrice pouvant aller jusqu'à 300 kilomètres carrés en brouillant les radars et systèmes de détection en tous genres, notamment ceux de drones, ou en désorientant certains missiles.
De manière assez cruciale, le Krasukha-4 a également été conçu pour aveugler les systèmes de détection et de commandement aéroporté (les AWACS en anglais, tel le fameux Boeing E-3 Sentry).
Ceux de l'OTAN effectuent de très régulières sorties aux abords des frontières de l'Ukraine pour surveiller la situation sur le terrain et, comme le note The Drive, une équipe de CNN ayant pu suivre la mission de l'un de ces avions de surveillance avait noté que ses radars étaient assez logiquement soumis à de réguliers brouillages.
Secret (désormais) de polichinelle
Ce qu'il est advenu du container découvert sur le flanc par les forces ukrainiennes reste flou, mais sa position dans les environs de Kiev, où font rage une partie des combats les plus stratégiques de la guerre, semble logique.
Certains experts cités par The Drive notent que la Russie ne fait en Ukraine, pour l'instant, qu'un usage modéré de ses appareils les plus avancés de guerre électronique, possiblement par peur que les forces ennemies ne mettent la main sur un matériel aussi sensible.
U.S. has not seen full-scale Russian effort in electronic warfare in Ukraine: senior defense official.
— Jack Detsch (@JackDetsch) February 25, 2022
C'est pourtant précisément ce qui s'est produit et, selon le Telegraph britannique, il est déjà question que la chose soit envoyée sur la base aérienne américaine de Ramstein, en Allemagne, avant d'être transférée aux États-Unis pour être entièrement décortiquée et analysée.
Ce serait un ajout de choix à la collection de matériels exotiques constituée par le programme Foreign Materiel Exploitation (FME), qui permet aux États-Unis de conserver un œil sur les technologies de puissances adverses, voire d'entraîner ses armées à leur faire face.
Un peu plus tôt dans la guerre, un autre événement de ce type avait fait la joie des services occidentaux, lorsque les contremesures jusqu'alors inconnues des missiles Iskander-M avaient été découvertes, permettant de mieux comprendre comment la chose pouvait échapper aux systèmes antiaériens.
Cette guerre dont elle est la seule responsable est donc décidément bien coûteuse pour la Russie. Elle l'est en hommes, en matériels mais aussi en cette chose immatérielle et cruciale que sont les secrets technologiques.