La préparation médicale des astronautes à de longs voyages n'en est encore qu'à ses balbutiements. | Bradley Dunn via Unsplash
La préparation médicale des astronautes à de longs voyages n'en est encore qu'à ses balbutiements. | Bradley Dunn via Unsplash

Comment soigner les astronautes dans l'espace?

Ibuprofène, sédatifs, antibiotiques: l'effet de l'apesanteur sur des molécules indispensables reste difficile à évaluer.

Cela fait longtemps que la NASA étudie ce que l'espace change au fonctionnement du corps humain afin de préparer le grand objectif d'un voyage sur Mars. On sait déjà qu'il fragilise les os et les muscles, modifie le mouvement des fluides (comme le flux sanguin) ou expose à des radiations qui pourraient favoriser le cancer.

Mais plusieurs scientifiques voudraient attirer l'attention sur tout ce que l'on ignore encore, et notamment l'utilisation de médicaments. Faut-il changer les doses pour les rendre suffisamment efficaces? Comment les conserver pour ne pas risquer de s'intoxiquer avec des pilules périmées? Le corps humain en microgravité absorbe-il correctement les molécules?

Les réponses à ces questions restent pour l'instant en suspens. «Pour le moment, notre hypothèse est que les médicaments sont absorbés et distribués aux tissus de la même manière dans l'espace que sur Terre, idem pour la manière dont ils sont métabolisés et excrétés par le corps», explique pour Ars Technica Virginia Wotring, professeure à l'université spatiale internationale à Strasbourg.

«Il serait logique que les médicaments aient des effets différents dans la physiologie altérée des astronautes», ajoute néanmoins la Dr Tina Bayuse, qui dirige les opérations pharmaceutique du Johnson Space Center pour la NASA. «N'importe [lequel de ces changements] pourrait rendre n'importe quel médicament moins efficace ou augmenter ses effets secondaires.»

Le problème réside dans le fait qu'il est impossible de réaliser des études cliniques très réussies dans l'espace: les tests sont réalisés sur un trop petit échantillon d'individus et manquent de contrôles. Aller dans l'espace coûte très cher, ce qui restreint la répétition ou la validation d'expériences. Celles-ci ne peuvent en outre pas se multiplier à chaque voyage.

La plupart des tests ont donc lieu dans des laboratoires qui recréent artificiellement les conditions rencontrées en dehors de l'atmosphère terrestre.

C'est pourquoi Virginia Wotring et LaRona Smith, une administratrice clinique du Johnson Space Center, ont créé une application à destination des astronautes, pour qu'elles et ils enregistrent leurs prises de médicaments en vol.

Malgré une interruption anticipée du programme à cause d'un problème technique d'utilisation, les deux chercheuses ont publié leurs résultats en janvier dans le journal d'Aerospace Medicine and Human Performance. Elles rapportent avoir reçu les données pour 5766 utilisations de médicaments –soit trente-huit fois plus que toutes les archives combinées pour les vols spatiaux précédents.

Sédatifs, adrénaline, somnifères, antidépresseurs

D'après leurs résultats, il semblerait que l'usage de médicaments soit plus élevé à bord de la Station spatiale internationale (ISS) que sur Terre –notamment lorsqu'il s'agit de pilules pour aider à dormir ou d'anti-douleurs comme l'Ibuprofène.

Les chercheuses rapportent surtout que «la plupart des médicaments ont été considérés partiellement efficaces» par les astronautes. Un résultat qui les inquiète, surtout parce qu'il montre à quel point on méconnaît les risques liés à l'expiration des médicaments ou à un surdosage.

«Je ne veux pas donner l'impression de sonner le signal d'alarme», avertit cependant Rebecca Blue, qui collabore avec l'Aerospace Medicine and Vestibular Research Laboratory de la Clinic Mayo dans l'Arizona. «Parce que la vérité est juste que nous ne savons pas.»

Un constat qui semble accompagner les rares études déjà réalisées sur la question. Publiée dans Clinical Pharmacology en 2005, l'une d'elle montrait déjà que la ciprofloxacine, un antibiotique classique, semblait avoir plus de mal à pénétrer les tissus corporels à cause la micro-gravité –d'après des tests sur six patients dans un hôpital en Floride. Sauf que la technique utilisée pour reproduire un vol spatial, bien qu'excellente d'après une étude de 2011, ne peut complètement imiter les conditions réelles.

Pour obtenir davantage de données, la NASA travaille donc à implémenter un protocole similaire à celui de Wotring pour de futures missions. Les astronautes ont un cabinet médical fourni à disposition: on y trouve entre autre de la caféine, des sédatifs, des antibiotiques, de l'adrénaline, des somnifères, des antidépresseurs ou des hormones.

Cela dit, les astronautes croisent surtout les doigts pour qu'il n'y ait jamais de raison de procéder à une chirurgie médicale dans l'espace: une urgence serait statistiquement garantie pour un équipage de six personnes en route pour une mission de 900 jours sur Mars.

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