Le compte Instagram @kensingtonroyal a été créé en 2015. Il représentait alors Kate Middleton et les princes William et Harry. En 2018, lorsque Harry s'est marié avec Meghan Markle, un nouveau compte @sussexroyal a été créé pour le couple.
Ce compte a un temps détenu le record du million d'abonné·es obtenu le plus rapidement (cinq heures et quarante-cinq minutes). Son nombre d'abonnements a ensuite connu une croissance exponentielle, rattrapant rapidement @kensingtonroyal.
Le dépassement semblait inévitable, Harry et Meghan écrasant William et Kate, que ce soit en popularité ou en intérêt (83% des recherches Google de l'époque sur les deux couples concernaient les Sussex).
Seulement, ce dépassement n'a jamais eu lieu. Ni la naissance de leur premier enfant, ni l'abandon de leur rôle officiel dans la famille royale n'est parvenu à détrôner le compte créé en 2015. Assez pour faire naître de nombreuses rumeurs chez les addicts aux péripéties royales.
Et si Kate et William, ou du moins leur équipe chargée des réseaux sociaux, gonflait artificiellement leur popularité pour ne pas être devancés par Harry et Meghan? Surtout que les personnes qui achètent de faux followers sont plus malignes qu'il y a quelques années. Le challenge est de le faire de façon mathématiquement intraçable: des petites quantités étalées sur le long terme.
Données opaques et manipulations
Seulement, le mystère ne sera probablement jamais résolu. En 2018, TechCrunch rapportait que Facebook, alors en plein scandale Cambridge Analytica, avait restreint la quantité de données disponibles pour les développeurs et les développeuses. Résultat: plus d'intimité pour les utilisateurs et les utilisatrices, mais moins d'informations pour les spécialistes des réseaux sociaux.
En ce moment, les algorithmes qui président aux destinées de ces plateformes fonctionnent «comme une boîte noire», explique Alex Taub, le fondateur de l'entreprise d'analyse SocialRank. «Du jour au lendemain, presque tous les outils d'analyse sont morts. Il est difficile de savoir qui suit qui, à part en allant fouiller les comptes un par un.»
Des données mieux protégées sont certainement une bonne chose pour monsieur et madame Tout-le-Monde, et les futiles guerres d'ego entre têtes couronnées. Seulement, elles sont loin d'être le problème principal.
Car savoir qui suit qui et qui fait quoi est aussi une fonctionnalité importante pour comprendre comment les grandes entreprises ou chef·fes d'États manipulent les réseaux sociaux à leur profit.
«C'est frustrant d'avoir aussi peu d'accès aux données», estime Samuel Wooley, professeur à l'Université du Texas. «Surtout lorsque les réseaux sociaux, principalement Twitter, sont le mode de communication préféré des politiciens.»