Dans un avenir peut-être proche (et franchement hostile), tous les magasins dans lesquels vous voudrez entrer seront équipés de videurs invisibles, qui décideront instantanément de vous accorder l'entrée ou non. Partout aux États-Unis, raconte le Seattle Times dans une enquête du 30 juin, de grandes chaînes de supermarchés –Target, Walmart ou Jacksons Food Stores– équipent leurs établissements de nouveaux systèmes de sécurité automatisés.
Le principe est aussi élémentaire qu'effrayant: la porte est surmontée d'une caméra, elle-même équipée d'un algorithme de reconnaissance faciale. Avant de pénétrer dans le magasin, le visage de la personne entrante est scanné et comparé à une base de données recensant les vols à l'étalage. S'il est reconnu par le système, la porte refuse de s'ouvrir. Idem si la personne est masquée, même partiellement. (Porter une casquette ou des lunettes suffit à bloquer la porte, selon un reportage de la chaîne KGW News à Portland).
Prolifération des systèmes
Blue Line Technology, l'entreprise qui fournit le matériel pour Jacksons Food Stores (et pour une vingtaine d'autres chaînes, assure son PDG) précise qu'elle ne fournit pas de bases de données de criminels. Sans accès à un registre national des suspects, les gérant·es sont chargé·es de constituer le trombinoscope des voleurs potentiels. En l'absence de toute régulation, les visages sont conservés sans limite de durée. Et les autres, alors? Impossible de savoir où, comment et combien de temps leurs visages sont stockés. Quant à la police, elle aura accès aux images uniquement si la personne responsable du magasin choisit de les partager.
Si le système installé chez Jacksons Food Stores est probablement ce qui se fait de plus radical, d'autres systèmes de surveillance automatisés prolifèrent. L'année dernière, la chaîne américaine 7-Eleven installait des caméras intelligentes, déjà largement utilisées en Chine, dans ses 11.000 enseignes thaïlandaises. En France, Carrefour travaille sur un système de paiement par reconnaissance faciale, à la manière de ce qu'offre déjà l'application chinoise WeChat. La technologie, assure-t-on, est là. Ne reste plus qu'à convaincre la Cnil. Bonne chance: aux dernières nouvelles, le régulateur français n'était pas franchement enthousiaste.