Parce que la situation internationale manquait d'un peu de tension, Kim Jong-un et la Corée du Nord ont décidé de poursuivre, comme si de rien n'était, leur programme de missiles balistiques.
Promettant via un média d'État une «redoutable capacité de frappe», Pyongyang procédait ainsi, le 25 mars, au lancement de ce que le pays (et les analystes internationaux) présentait au monde comme un «monstre», un missile balistique intercontinental (ICBM) nommé Hwasong-17 à multiples têtes, capable d'aller chercher des noises jusque sur le sol américain.
Le tout était accompagné d'un film ahurissant et sans doute à gros budget, digne pourtant d'une version B de Top Gun, dont un court extrait comme la version intégrale, 11 minutes délirantes d'une propagande grotesque, sont visibles ci-dessous.
⚔️🇰🇵 Reportage de la télévision d'État nord-coréenne sur le lancement du missile balistique intercontinental "Hwasong-17", ⬆️ On estime que cette fusée à deux étages a une portée de 13 000 kilomètres, ce qui met tout le territoire des USA dans sa portée.#KimJongUn #BFMTV #Cnews pic.twitter.com/3l0OhyhpbW
— BLF.TV (@blf_tv) March 27, 2022
Contrairement à une tentative effectuée le 16 mars et qui s'est soldée par un échec presque instantané, le lancement du Hwasong-17 le 25 mars a été présenté comme un franc succès par Pyongyang. Sauf que: selon les services de renseignements de la Corée du Sud, tout ceci serait ce que le jargon militaire technique nomme «du pipeau».
Une histoire d'ombres
Comme l'explique Bloomberg, les services de Séoul ont décortiqué les images fournies par leur voisin du nord, et ont détecté quelques ombres suspectes ne collant pas avec le calendrier revendiqué par Pyongyang. L'engin lancé le 25 mars l'a été durant l'après-midi, mais les ombres de celui en train de décoller dans la vidéo semblent indiquer un décollage matinal.
Séoul pense donc que Pyongyang a mélangé les images de deux lancements pour son ébouriffante propagande vidéo, l'un réussi et l'autre raté. Si l'engin lancé le 25 mars a bien atteint l'espace avant d'aller s'écraser au large du Japon, il ne s'agit sans doute pas du rutilant Hwasong-17 vanté par Kim Jong-un et son régime, mais de sa version précédente et déjà connue, le Hwasong-15.
Le Hwasong-17 serait, lui, celui qui a explosé dans un boum retentissant juste après son décollage le 16 mars et le lancement du 25 mars d'un Hwasong-15 n'aurait servi que pour faire croire au succès du nouveau bidule intercontinental et multitêtes de Kim Jong-un.
Ce qui ne l'a pas empêché de déclarer que l'événement était «une victoire sans prix pour le grand Peuple coréen» et d'ajouter que ses armées étaient «totalement prêtes à contrer vigoureusement toute tentative d'activité militaire dangereuse de la part des impérialistes américains».
Tout ceci pourrait prêter à rire si les menaces atomiques et balistiques du régime nord-coréen ne reposaient pas sur un incontestable fond de vérité: échec ou non, le programme du pays continue d'avancer à grand pas, ce qui ajoute quelques complexités à la situation internationale.