Un réseau un peu trop branché dans les milieux d'extrême droite. | Dina Lydia via Unsplash
Un réseau un peu trop branché dans les milieux d'extrême droite. | Dina Lydia via Unsplash

Aux États-Unis, des terroristes d'extrême droite visent le réseau électrique et son effondrement

Des millions de morts potentiels, expliquent des experts.

Interrogé par Newsweek dans un long article consacré aux fragilités du réseau électrique américain et aux attaques de groupuscules d'extrême droite qu'il subit déjà depuis quelques mois, Michael Mabee n'y va pas par quatre chemins: de tels dommages physiques pourraient avoir des conséquences apocalyptiques pour le pays.

«Si suffisamment de transformateurs électriques étaient détruits lors d'une attaque coordonnée, explique l'ancien général de l'armée US et expert en vulnérabilités énergétiques, cela aurait des répercussions longues, provoquerait des coupures à grande échelle, et les morts se compteraient par dizaines de milliers, par centaines de milliers, par millions.»

Michael Mabee n'est pas le seul à être inquiet, et a des raisons assez solides de craindre un tel complot contre la grille électrique américaine. Dans les huit premiers mois de l'année 2022, elle a été attaquée physiquement 107 fois, plus que lors de la décennie précédente.

Début décembre, l'un de ces attentats, mené au fusil mitrailleur contre deux postes électriques à Moore County, en Caroline du Nord, plongeait 40.000 habitants dans le noir et le froid pendant plusieurs jours. Quelques semaines plus tard, un sabotage similaire avait lieu dans le comté de Pierce, dans l'État de Washington, coupant le courant à 14.000 personnes le jour de Noël.

Oregon, Washington, Caroline du Nord, Oklahoma, Dakota du Sud, Californie: ce type d'attaque, souvent contre des «substations» complexes, longues et coûteuses à remplacer, se multiplie un peu partout aux États-Unis.

Et si l'on sait que le réseau électrique américain aiguise les appétits de nations extérieures et hostiles, pas besoin d'aller jusqu'à Moscou et ses hackers pour situer les menaces.

Selon Newsweek et certain experts interrogés par le média, ces attaques sont ainsi souvent l'œuvre de groupuscules «domestiques» d'extrême droite, qui s'échangent sous le manteau renseignements et astuces sur les cibles potentielles et les moyens les plus efficaces de les mettre hors service, et célèbrent sur d'obscurs forums interlopes du web les attaques qui se produisent un peu partout.

Dans le cas de ces récentes séries d'attaques, Newsweek cite les «accélérationnistes», ces mouvances nageant dans le néonazisme et le suprémacisme blanc. Elles visent la chute de la civilisation actuelle ou cherchent à déclencher une «guerre des races», comme ces trois hommes arrêtés avant de passer à l'action.

Domino

Tous savent la fragilité du réseau américain, et comprennent que de multiples petites attaques bien placées peuvent, par effet domino, causer des dégâts cataclysmiques. Ils ont un exemple: le Great Northeast Blackout de 2003, décrit comme la plus grande catastrophe énergétique de l'histoire du continent.

55 millions de personnes, aux États-Unis et au Canada, étaient alors plongées dans le noir –il n'avait fallu qu'un seul arbre sur une seule ligne pour qu'une grande portion du réseau national s'effondre.

Plus récemment mais pour d'autres raisons, la panne géante au Texas en 2001 ou la catastrophe massive évitée de justesse lors du «blizzard du siècle» ont pu rappeler à quel point le pays le plus riche et avancé du monde reposait sur un réseau électrique mal conçu, mal protégé, manquant de résilience et d'adaptabilité en cas de disruption.

À la suite de la grande panne de 2003, le Congrès a passé diverses lois pour pousser les utilities, les milliers de fournisseurs d'électricité qui jalonnent un pays intégralement ouvert à toutes les concurrences, à revoir leur copie. Newsweek l'explique: c'est insuffisant, très largement insuffisant, comme le sont leurs efforts pour protéger la grille dans son ensemble de ces attaques éparses pouvant mener au désastre global.

Comme le résume Thomas Popik de la Foundation for Resilient Societies, qui milite pour que ces questions soient mieux traitées, l'Amérique joue avec le feu et avec sa fin.

«S'il faut une attaque majeure pour attirer l'attention des législateurs et régulateurs, l'Amérique pourrait ne pas avoir de deuxième chance, avance-t-il. C'est la réalité: la première grande attaque pourrait être la dernière grande attaque, parce que l'Amérique serait à genoux. Pour elle, les lumières s'éteindraient.»

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