Nécessitant d'opérer à une température de plusieurs millions de degrés Celsius, la fusion nucléaire est encore un objectif lointain, mais on s'en rapproche petit à petit. Ce processus d'union de deux noyaux atomiques, pour n'en former qu'un seul, qui libère une gigantesque quantité d'énergie, a été théorisé il y a bien longtemps et la science s'évertue à lui donner corps.
Si la fusion nucléaire constitue un objectif aussi important, c'est parce qu'elle résoudrait bien des problèmes dans le domaine de l'énergie: quelques grammes de deutérium et de tritium, des formes lourdes de l'hydrogène, suffisent théoriquement pour produire 1 térajoule d'énergie, soit l'équivalent de soixante années des besoins d'une personne vivant dans un pays développé.
Ce processus de fusion, celui-là même qui fait briller le soleil et les étoiles, nous est encore inaccessible. Mais la science vient de faire un nouveau pas vers lui, confie Motherboard, en faisant entrer des champs magnétiques dans l'équation –ce qui améliorerait considérablement la production d'énergie.
Pour cela, le National Ignition Facility (NIF), un laser de recherche extrêmement puissant installé dans la ville californienne de Livermore (Californie), au sein d'un laboratoire chaperonné par le département américain de l'Énergie, a été mis à contribution.
Triple énergie
Le dernier rapport du laboratoire Lawrence Livermore indique que, d'après les derniers travaux initiés, les champs magnétiques permettent d'obtenir des pics de température supérieurs de 40% aux chiffres précédents et de tripler la production d'énergie réalisée à l'occasion de la fusion.
Cette étude, publiée dans la revue Physical Review Letters, constitue un «rapprochement des conditions nécessaires pour atteindre l'ignition», seuil mythique au-delà duquel la réaction de fusion produit assez d'énergie pour s'auto-entretenir.
Les champs magnétiques agiraient en fait comme des isolants empêchant les millions de degrés Celsius mesurés au cœur de la fusion de s'échapper vers les zones plus froides (c'est-à-dire le reste du monde). En évitant la déperdition de chaleur et d'énergie, on se donne alors la possibilité d'engendrer davantage de réactions de fusion, donc de gagner encore en température et en énergie. Un cercle vertueux qui peut effectivement mener vers des sommets.
Les résultats des expériences menées ont surpris tout le monde explique John Moody, qui a dirigé les travaux: «Nous essayons de comprendre pourquoi ça a été une plus grande réussite que prévu. Chaque fois qu'on constate une différence entre la théorie et la pratique, nous pouvons apprendre beaucoup en essayant de comprendre ce qu'il s'est produit.» Habituellement, il s'agit de chercher pourquoi les choses ont moins bien marché que sur le papier, mais pas cette fois.
Bien que certaines start-up promettent d'aller beaucoup plus vite, il faudra encore sans doute des décennies avant de pouvoir, peut-être, atteindre des résultats à même d'être utilisés concrètement, c'est-à-dire de pouvoir alimenter l'humanité en énergie dite propre.
Alors que le point d'ignition n'est pas encore atteint, les spécialistes estiment en effet qu'il serait souhaitable d'atteindre une production d'énergie dix fois supérieure à la consommation d'énergie permettant de faire fonctionner le réacteur. On en est encore loin, mais les petits ruisseaux font les grandes rivières.
L'apport des champs magnétiques pourrait même n'en être qu'à ses débuts, estime John Moody, qui compte bien en faire l'un des points forts de son laboratoire pour les années à venir et tenter d'effectuer des pas supplémentaires et substantiels vers cette fusion tant attendue.