«La guerre comme un jeu vidéo, quel meilleur moyen d'élever le soldat ultime?», claironnait jadis le superespion Solid Snake dans Metal Gear Solid. La saga vidéoludique, commencée sur PlayStation en 1998 et brisant régulièrement le quatrième mur, avait en effet choisi de mettre en scène les entraînements au sein d'une fausse réalité virtuelle.
Les décors y étaient remplacés par des cubes bleus transparents et froids, aux contours brillants, traversés par de vives lumières serpentant au niveau du sol. Au loin et dans les menus, on pouvait distinguer des lignes de codes.
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Modern Warfare
Si les simulateurs existent de longue date, entre autres pour les pilotes de chasse, les entraînements virtuels de fantassins relevaient jusqu'ici du domaine de l'imaginaire. Mais ils sont en train de se concrétiser grâce aux progrès de plusieurs technologies.
D'abord, grâce aux avancées de la réalité virtuelle. Sous l'impulsion de l'industrie vidéoludique –puis du soufflé retombé du métavers–, les casques de réalité virtuelle (VR), les accessoires associés et le graphisme des jeux se sont sophistiqués. Puis, avec le retour haptique: de plus en plus de sensations –même les moins agréables– liées au toucher peuvent désormais être artificiellement reproduites.
En décembre dernier, le média EurAsian Times dévoilait une vidéo montrant des soldats chinois s'entraînant dans un environnement dédié, casques de VR sur la tête, possiblement en vue de la «reconquête» de Taïwan. Aux Etats-Unis, où l'industrie vidéoludique et les militaires entretiennent des liens depuis un moment, la VR sert aussi à l'entraînement des soldats, mais aussi au traitement du syndrome de stress post-traumatique (PTSD) les atteignant, comme le relatait Vice en mai 2022.
It's electric
De quoi donner des idées à quatre start-up françaises, chacune spécialisée dans un segment, qui se sont regroupées afin de proposer une offre combinant réalité virtuelle et retour haptique. Leur but: offrir les entraînements simulés les plus immersifs possible, notamment à destination des forces spéciales.
Lynx développe des casques VR; ProTubeVR des accessoires dédiés (pistolets, fusils, joysticks, etc.); Iconik des jeux vidéo en réalité virtuelle; et Actronika des accessoires haptiques, notamment des gilets. Ces derniers «peuvent envoyer des vibrations, mais aussi des chocs électriques [si c'est ce que souhaite le client]», explique à Korii l'entreprise, qui vante également les applications de sa technologie dans les secteurs «du luxe, de l'automobile et la sextech».
Un tel entraînement peut reposer sur la réalité virtuelle ou sur la réalité augmentée, qui consiste à ajouter dans un terrain d'entraînement bien réel des éléments virtuels que les soldats peuvent «voir», «entendre» et «toucher». En plus de la vision et de l'ouïe, l'immersion est renforcée par le retour haptique, capable de faire endurer aux soldats des sensations proches de celles provoquées par les impacts de balles et autres explosions.
Lors du salon des forces spéciales Sofins, organisé en mars, la solution des start-uppers français a notamment suscité l'intérêt du GIGN, le groupe d'intervention de la gendarmerie nationale, et des pompiers tricolores, mais aussi des forces spéciales de pays étrangers tels que la Croatie.