Alors que la COP26, où Xi Jinping ne s'est pas déplacé, bat son plein, il ne fait aucun doute que les espoirs du monde reposent pour partie sur la Chine, dont les émissions de gaz à effet de serre battent des records. Le pays a promis d'atteindre son pic en 2030, avant de chercher la neutralité en carbone en 2060.
Le pays investit des sommes colossales dans les énergies renouvelables et les ajustements industriels. Mais la route reste longue. Comme le reste du monde, la Chine est en proie à une crise énergétique majeure. Au point de n'avoir eu d'autres choix ces derniers mois que d'augmenter la part du charbon, la plus polluante des énergies, dans la production d'électricité.
Pour se défaire de cette dépendance, l'empire du Milieu, ne compte pas seulement sur l'éolien, l'hydraulique ou le solaire. Comme l'explique Bloomberg, les ambitions du pays reposent également sur un plan nucléaire qui donnera quelques sueurs froides aux contempteurs de l'énergie atomique.
Le pays compte ainsi bâtir plus de 150 nouveaux réacteurs dans les quinze prochaines années –plus que le reste du monde les trente-cinq précédentes. Le plan devrait coûter au pays la bagatelle de 380 milliards d'euros, avec l'objectif annoncé de produire 200 gigawatts d'ici 2035, soit, comme le calcule Bloomberg, de quoi alimenter l'équivalent d'une douzaine de mégalopoles comme Pékin.
Selon les autorités chinoises, ce parc atomique serait à même d'éviter l'émission de 1,5 milliard de tonnes de CO2, plus que ce que produisent chaque année les activités de la France, de l'Allemagne, du Royaume-Uni et de l'Espagne réunis.
Rayonnement international
Pour des raisons géopolitiques et du fait des liens étroits entre les opérateurs chinois et le complexe militaro-industriel du pays, les technologies de Pékin ne sont plus toujours les bienvenues en Occident. Elles pourraient néanmoins constituer des investissements de choix dans une partie du reste du monde, qui cherchera à verdir son économie.
C'est aussi sur cette exportation que l'empire du Milieu compte pour amortir ses investissements: le pays espère, grâce à sa «nouvelle route de la soie», construire trente réacteurs dans des pays amis, le Pakistan notamment.
Bloomberg livre son analyse relative au coût initial du nucléaire. S'il reste plus élevé que celui des énergies renouvelables, restant les deux premiers postes de dépense du pays, les investissements se font à un coût bien moindre qu'en Occident. C'est notamment grâce aux prêts à taux d'intérêts quasi-nuls consentis par la République populaire pour la construction des réacteurs.
«Avec un taux à 1,4%, le minimum pour des projets d'infrastructures en Chine ou en Russie, le coût de l'énergie nucléaire est d'environ 36 euros par mégawatt-heure. C'est une somme bien moindre que celle du gaz ou du charbon dans nombre d'endroits, écrivent Dan Murtaugh et Krystal Chia pour Bloomberg. Avec un taux de 10%, le haut du spectre dans les économies développées, ce coût atteint 83 euros, bien plus que tout le reste.»
Quid de la sécurité de ces installations? C'est, bien sûr, là que le bât blesse. Les réacteurs conçus dans le pays, Hualong One, n'ont jusqu'ici posé aucun problème –du moins officiellement. La Chine est en outre engagée dans des recherches tous azimuts, dont l'une des plus directement exploitables concerne un réacteur modulaire nommé Linglong-1. Elle devrait être construite sur l'île de Hainan, a-t-on appris il y a quelques semaines.
Mais, en juin 2021, l'incident à l'EPR de Taishan, conçu par EDF, a eu de quoi éroder la confiance sur la capacité du pays à sécuriser ses centrales. Les autorités ont communiqué de manière «tchernobylesque» et taiseuse. Ce manque de transparence, qu'une telle technologie exige, alimente les doutes. Si la Chine s'apprête à faire plus, beaucoup plus, elle devra aussi apprendre à faire mieux, beaucoup mieux.