Elon Musk aime apparemment les lettres. Après avoir envoyé une missive aux employés de Tesla pour les supplier de tout faire pour réduire les frais de livraisons des autos de la firme électrique, c'est à ses troupes au sein de SpaceX qu'il s'est directement adressé, le lendemain de Thanksgiving.
Il n'y est pas allé par quatre chemins, mais bien par une seule route, celle de la menace: quelque peu affolé, il a ainsi expliqué à ses ouailles que SpaceX risquait purement et simplement la banqueroute si elle ne trouvait pas une parade aux problèmes handicapant la production des moteurs Raptor.
«La crise de production qui affecte les moteurs Raptor est bien pire qu'elle ne semblait l'être il y a quelques semaines», écrit-il à propos de ces choses destinées à envoyer dans l'espace Starship, le futur gros porteur-star de la firme. «Nous risquons la banqueroute si nous ne réussissons pas à atteindre l'année prochaine le rythme d'un lancement de Starship chaque semaine ou tous les quinze jours au moins.»
Destinée in fine à envoyer humains et matériels sur la Lune ou sur Mars, Starship est une grosse machine dont la mise en orbite –ce sera l'objet d'un très attendu prochain test– peut nécessiter jusqu'à trente-neuf moteurs Raptor.
Cadence infernale
Le modèle économique de SpaceX reposant sur la cadence infernale des lancements de ses fusées, en particulier pour bâtir avec célérité le réseau internet satellitaire Starlink. Ce dernier est un enjeu financier majeur pour l'avenir de l'entreprise dans son ensemble, et un plan financier que Musk lui-même a qualifié de fragile.
On peut donc aisément imaginer à quel rythme cette dernière doit construire lesdits réacteurs pour permettre à Starship de constituer rapidement la mule spatiale taillable et corvéable à merci qu'elle est destinée à devenir.
Starlink a augmenté la cadence de production des antennes qu'elle vend et fournit à sa clientèle terrestre, mais celles-ci pourraient s'avérer inutiles si l'entreprise ne peut déployer, rapidement et en masse, les satellites nouvelle génération de son réseau; la taille plus modeste des fusées Falcon 9 impose de le faire avec des engins Starship.
«Alors que nous plongions dans les problèmes ayant suivi le départ du management précédent, ils se sont malheureusement révélés bien plus sévère que ce qui avait été rapporté», écrit Musk dans sa missive en faisant une référence directe à Will Heltsley, ex-patron du programme Raptor à qui SpaceX a récemment montré le chemin de la sortie.
«Il faut que tout le monde mette la main à la pâte pour que nous puissions nous remettre de ce qui est, honnêtement, un désastre», poursuit l'entrepreneur, qui semble s'être lui-même pleinement investi dans cette tâche les jours suivants.
Que ses efforts paient immédiatement ou non, la banqueroute de SpaceX reste néanmoins peu probable: une firme valant plus de 100 milliards de dollars, et à laquelle Morgan Stanley promet un avenir financier plus brillant encore que celui de Tesla, a sans aucun doute de quoi trouver la parade pour éviter de s'effondrer si tôt.