Après trente-trois années passées en orbite, la Station spatiale internationale (ISS) doit tirer sa révérence en 2031: à la suite de sa désorbitation, elle opérera un grand plongeon à travers l'atmosphère, pour finir par s'écraser dans l'océan Pacifique. Mais cela ne se fera pas en un claquement de doigts.
La BBC raconte qu'en mars, la NASA a demandé au Congrès américain de financer le développement d'une sorte de remorqueur spatial qui permettrait de faire sortir l'ISS de son orbite et de la faire pénétrer dans l'atmosphère. Coût de l'engin: environ 1 milliard de dollars, soit plus de 900 millions d'euros.
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L'opération ne sera pas une mince affaire, car l'ISS n'est pas du même gabarit que la station Mir, qui s'est désintégrée dans l'atmosphère en 2001, ni que celle nommée Skylab, qui avait fait de même en 1979. Longue de 109 mètres (c'est trois fois plus que Mir), elle est aussi très lourde. Or, comme le résume si bien Jonathan McDowell, astrophysicien au Centre d'astrophysique de Harvard, «un objet de 400 tonnes tombant du ciel, ce n'est pas top».
Initialement, l'ISS n'aurait même pas dû être utilisée jusqu'en 2031, mais la NASA est parvenue à repousser la date fatidique à plusieurs reprises. Il n'y aura toutefois pas de nouveau report: au-delà de l'année 2030, la station ne présentera plus les garanties de sécurité suffisantes. Il n'y a donc pas d'autre solution que de s'en séparer, et pas d'autre méthode qu'un retour dans l'atmosphère.
Le procédé consistant à déplacer l'ISS vers une orbite plus éloignée de la Terre avait un temps été prise en considération, mais elle a rapidement été écartée: une telle opération aurait nécessité qu'un grand nombre d'engins spatiaux hissent simultanément la station à une altitude supérieure. Peine perdue.
Plus dure sera la chute
C'est donc bien à une redescente qu'il faudra procéder, et celle-ci doit débuter dès 2026. L'ISS mettra ensuite cinq bonnes années pour réaliser la première phase de sa chute, passant de 400 à 320 kilomètres d'altitude. C'est alors qu'une dernière équipe sera envoyée dans la station, afin de la nettoyer. L'objectif est double: n'oublier aucun objet de valeur (monétaire comme sentimentale) pouvant être sauvé, mais aussi réduire au maximum le poids de l'ISS.
Une fois cette dernière équipe partie, l'altitude chutera aux alentours de 280 kilomètres, ce qui constituera un point de non-retour pour la station: elle sera alors happée par l'atmosphère. Mais il lui faudra un dernier petit coup de pouce pour y entrer réellement. Le vaisseau Progress lui donnera alors une pichenette spatiale visant à l'y faire pénétrer vaille que vaille. Sauf si l'engin russe se révèle trop peu fiable pour cela –et comme la NASA a actuellement un doute, elle préfère tenter de taxer 1 milliard au Congrès pour fabriquer son propre appareil.
La descente se poursuivra jusqu'à une altitude de 120 kilomètres, où l'ISS traversera la couche la plus fine de l'atmosphère terrestre à une vitesse de 29.000 km/h. Ses panneaux solaires vont alors se décrocher en quelques minutes; puis, vers 80 kilomètres d'altitude, les modules vont eux aussi être arrachés, avant de se désintégrer sous l'effet des hautes températures. On pourra alors entendre plusieurs explosions soniques.
Ce qui restera de l'ISS finira par tomber au niveau du point Nemo, zone de l'océan Pacifique comprise entre la Nouvelle-Zélande et l'Amérique du Sud et considérée comme le cimetière spatial de la Terre. Aussi loin que possible de toute habitation, cet emplacement assure sur le papier qu'aucune vie humaine ne soit menacée par cette chute. Quant à la vie animale, elle est a priori très pauvre dans cette zone en raison d'un manque certain de nutriments.
Plusieurs spécialistes affirment qu'une grande opération de récupération des matériaux pourrait de plus être menée, afin d'éviter un gigantesque gâchis et de réduire autant que possible la quantité de matériaux qui finira dans les fonds marins. «Ce sont des coûts irrécupérables», affirme John Klein, expert en politique spatiale à l'université George Washington. «Ce qui peut être réutilisé doit l'être.»