Le 21 janvier dernier, Andrew Rehder, directeur d'une usine 3M fabriquant des masques filtrants en Dakota du Sud, reçoit un appel du siège social: un nouveau virus se répand en Chine, la demande ne devrait pas tarder à exploser.
Ce n'est pas la première fois que l'établissement de Rehder doit réagir dans l'urgence. Les épidémies de SRAS, d'Ebola ou de H1N1 l'avaient déjà poussée à repenser sa stratégie de crise pour parer à toute éventualité. Plus récemment, les incendies australiens et une éruption aux Philippines ont également bouleversé son rythme de production.
Mais cette fois, la situation pourrait bien se révéler sans commune mesure avec les événements passés. Rehder décide alors de faire fonctionner son usine à plein régime: pas une machine ne doit rester à l'arrêt et l'intégralité de sa main-d'œuvre, renforcée par de nouvelles recrues, est invitée à faire les 3x8.
Une usine au service d'un pays
Depuis le début de l'épidémie de Covid-19, plusieurs pays connaissent une pénurie de masques. Pour pallier ce problème, 3M a doublé sa production, qui atteint désormais les 100 millions d'unités mensuelles, soit plus d'un milliard produites d'ici à la fin 2020.
En période de pandémie mondiale et de pénuries localisées, l'une des forces du conglomérat repose sur l'internationalisation de sa production. Son usine chinoise produit pour la Chine, qui a interdit les exportations dès le début de la crise, celle en Corée du Sud fabrique des masques pour le marché coréen.
Surtout, 3M n'a pas délocalisé ses unités d'Aberdeen et d'Omaha, aux États-Unis, qui ont mis toutes leurs forces au service de l'approvisionnement du territoire américain.
Atout supplémentaire: la plupart des éléments constituant les masques chirurgicaux, qui répondent à des normes strictes, sont fabriqués sur place, ce qui rend le groupe moins dépendant d'entreprises tierces ou lointaines.
3M souhaite encore accélérer la cadence: des investissements dans de nouveaux équipements devraient lui permettre d'atteindre les 2 milliards de masques annuels dans les douze mois à venir.
Depuis l'intensification de la pandémie, la raréfaction des masques a engendré une hausse des prix. Aux États-Unis, certains modèles s'échangeraient jusqu'à dix fois leur tarif habituel.
À cet égard, le gouverneur de New York Andrew Cuomo a fait remarquer que les masques que son État achète d'ordinaire pour 85 cents pièce coûtaient aujourd'hui 7 dollars. De son côté, 3M assure ne pas avoir augmenté ses tarifs et rejette la faute sur les distributeurs.