Nous nous sommes gaussés, ces dernières années, d'un Japon entre tradition et modernité, mais surtout du côté de la tradition, et qui semblait avoir beaucoup de mal à dire au revoir à la disquette 3,5 pouces... Ce vieux support informatique que les moins de 20 ans, ces veinards, ne peuvent pas connaître.
C'était injuste envers le Japon. Le pays d'Asie est bien loin d'être le seul à faire encore usage de ces antédiluviennes disquettes, qui sont encore présentes dans un nombre impressionnant de systèmes techniques, ainsi que l'explique Ars Technica.
Le média américain prend l'exemple d'un homme spécialisé dans la broderie et dont les vieilles et coûteuses machines –de fabrication japonaises justement– ne permettent le transfert des designs à reproduire que via de telles disquettes.
Ces dernières ne concernent pourtant pas que des domaines ultra-spécialisés comme celui-ci. Jusqu'en 2019 et aussi fou ou étrange que cela puisse paraître, le très délicat arsenal nucléaire des États-Unis était encore géré grâce à de vieux floppy disks.
Plus étonnant encore: si vous êtes récemment monté dans un Boeing 747-200, mais c'est également vrai des 767 ou des Airbus A320 les plus anciens, il est possible que leurs systèmes informatiques continuent d'être mis à jour grâce à des disquettes.
«Quand une mise à jour est émise, nous devons d'abord la transférer sur deux disquettes 3,5 pouces. Et puisqu'aucun ordinateur actuel ne dispose du lecteur nécessaire, nous avons dû en acheter un spécifiquement pour cet usage», explique à Ars Technica, Davit Niazashvili, qui travaille à la maintenance de vieux avions cargo à Tbilissi, en Géorgie.
«Nous amenons ensuite les disquettes dans l'avion pour mettre le système à jour. L'opération prend environ une heure», ajoute-t-il. Ces mises à jour, explique Ars Technica, comprennent des données cruciales, comme des changements apportés à la cartographie de certains aéroports ou à des aides à la navigation.
Oldie but goodie
Il existe des solutions, des adaptateurs ou des émulateurs, pour contourner l'obligation parfois intenable de s'en tenir aux vieilles disquettes. Dans certains domaines d'activité très spécialisés, elles permettent de continuer à utiliser de vieilles et coûteuses machines. Mais dans le cas où le coût est trop important, ne rien changer de ses vieilles habitudes est sans doute la meilleure approche.
Davit Niazashvili décrit ainsi des supports fragiles, qu'il utilise environ trois fois avant de devoir les mettre à la poubelle. «Nous devons de toute façon le faire. Ce n'est pas un problème. Tant que les disquettes existent, cela nous va», conclut l'ingénieur, reprenant le vieux dicton de technicien «si ce n'est pas cassé, n'essaie pas de le réparer».
Où trouve-t-on, en 2023, de nouvelles disquettes? Sur Amazon, explique le Géorgien, le plus simplement du monde. Il aurait également pu s'adresser au site floppydisk.com. Ou à toute autre entreprise du même genre s'étant spécialisée dans la récupération de vieux stocks, ou bien le recyclage et la remise en circulation de disquettes usagées.
Cette archéologie technologique semble intéresser les foules, notamment quelques jeunes insouciants n'ayant jamais eu à changer trente-neuf fois de disquette pour installer un Windows bourré de bugs sur leur vieux 486-DX33.
Récemment, une vidéo cartonnait ainsi sur TikTok. Elle montrait le responsable d'un restaurant américain Chuck E Cheese, une chaîne familiale populaire outre-Atlantique, expliquer comment il mettait à jour le spectacle offert par les vieux automates présents dans son enseigne, grâce à une disquette envoyée chaque nouvelle saison par le siège de la franchise.
@showbizpizzaman How to install a new show at Chuck E. Cheese
♬ original sound - Stewart
Comme l'explique BuzzFeed, la chaîne comporte 600 restaurants au total, sur lesquels une cinquantaine utilisent encore des animatroniques. Vieilles de plusieurs décennies, celles-ci ne peuvent être mises à jour que grâce à ces disquettes 3,5 pouces que l'on croyait réservées aux musées. Le charme discret de la jeune antiquité, sans doute.