«Un pays entre tradition et modernité.» Clichetonne, la phrase est régulièrement utilisée pour décrire le Japon. Pour ce qui est de la numérisation des activités de ses entreprises et administrations, elle est pourtant plutôt fausse: le Japon en l'occurrence est un pays entre tradition et tradition.
L'archipel nippon peine ainsi notablement à se défaire de vieilles habitudes technologiques prises il y a de longues décennies. On se souvient ainsi, lors des premières semaines de la crise liée à la pandémie de Covid, comment la grande dépendance au fax des firmes et bureaucraties japonaises avait en partie empêché le pays de se mettre au télétravail.
Le gouvernement japonais avait alors essayé de pousser ses troupes à remiser le vieil engin au placard pour utiliser de plus modernes outils, mais un front de résistance s'était mis en place au sein de certaines administrations, rétives à ces progrès pourtant utiles.
Pas intimidé, le gouvernement japonais tente un nouvel assaut contre un petit objet qui, presque partout ailleurs dans le monde, appartient à un passé révolu que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître: la disquette. À la suite des autorités de la région de Tokyo, l'État nippon veut ainsi pousser ses agents à se passer tout à fait des sauvegardes sur ces antédiluviens supports physiques.
Digital Minister declares a war on floppy discs.
— KONO Taro (@konotaromp) August 31, 2022
There are about 1900 government procedures that requires business community to use discs, i. e. floppy disc, CD, MD, etc to submit applications and other forms. Digital Agency is to change those regulations so you can use online.
Dans un tweet posté le 31 août, le ministre aux affaires numériques Tarō Kōno a ainsi «déclaré une guerre aux disquettes», rappelant que la bagatelle de 1.900 procédures administratives nécessitaient encore l'usage et la transmission de ces vieux bidules, de CDs ou de MiniDiscs.
Retour vers le futur
Comme l'explique Bloomberg, Tarō Kōno a expliqué avoir le soutien total de son Premier ministre, Fumio Kishida. «Où peut-on de toute façon acheter une disquette de nos jours?», s'est d'ailleurs demandé le ministre lors d'une conférence de presse tenue le 30 août, pendant laquelle il a annoncé la mise en place d'une «task force» dont la mission est d'accélérer la transition.
Comme le note Bloomberg, le Japon n'est pas le seul à avoir longtemps traîné ce boulet de trois pouces et demi: ce n'est qu'en 2019 que le département américain de la Défense a annoncé l'arrêt de leur utilisation dans certains systèmes liés à l'arsenal nucléaire des États-Unis.
Modernisateur au forcing, Tarō Kōno n'a pas que la seule disquette dans le collimateur. Outre le sempiternel fax, qu'il souhaite également voir disparaître pour de bon, le ministre vise l'utilisation partout dans les administrations japonaises du «hanko», un sceau traditionnel encore très utilisé pour officialiser certains documents, comme les contrats de mariage notamment.