Une innovation d'apparence anodine dissimule parfois une myriade de possibilités insoupçonnées. Il en va ainsi de la start-up rennaise Cailabs, dont la technologie de conversion multiplan de la lumière (MPLC) permet de donner à un laser différentes formes, ou d'augmenter sa puissance en combinant plusieurs faisceaux. «La lumière a une forme et on peut la manipuler, jouer avec les modes spatiaux, décomposer, recombiner», explique l'entreprise à Korii.
Un premier domaine d'application concerne les communications par laser, qui incarnent en quelque sorte le futur des transmissions militaires, notamment pour communiquer avec les satellites depuis l'espace, sans avoir à passer par un relais au sol, mais aussi avec les sous-marins depuis le fond des océans.
Bien plus rapides –comme si l'on passait à la fibre–, sécurisées et simples d'utilisation que les communications par radiofréquences (RF), elles ne nécessitent pas de bande de fréquence dédiée. La plupart des géants mondiaux de la défense et des télécommunications planchent déjà sur le sujet.
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Néanmoins, cela soulève de nouvelles difficultés. En parcourant de longues distances, la lumière subit deux phénomènes principaux au contact des éléments qu'elle rencontre (nuages, atmosphère, etc): la perte de puissance et la déformation –au risque que le message n'arrive indéchiffrable à destination. La technologie MPLC permet à la fois d'augmenter la puissance de l'émission et de limiter sa déformation durant son trajet.
Sur le champ de bataille, les communications laser sont aussi plus difficiles à brouiller que celles par radiofréquences, même si des contre-mesures existent. Le rechargement des drones à distance par faisceau lumineux est également étudié.
Le laser, c'est canon
La fonction militaire la plus évidente –et fantasmée– du laser consiste à attaquer des cibles à distance, telles que drones, satellites ou missiles ennemis. Bien qu'il nécessite une grande quantité d'énergie, il présente plusieurs avantages: haute précision, très grande vitesse (celle de la lumière) et coût nettement réduit par rapport à une munition sophistiquée. En pointe sur le sujet avec (et face à) la Chine, le Pentagone cherche à en équiper navires et (plus surprenant) sous-marins.
Plus près de chez nous, le spécialiste français du laser militaire Cilas, récemment racheté par les industriels Safran et MBDA, travaille pour l'armée sur l'Helma-P: une arme à énergie dirigée qui doit notamment servir à contrer les essaims de drones. Si Cailabs ne développe pas encore de tels équipements, elle est capable de fusionner les faisceaux de nombreux lasers de faible puissance pour obtenir un unique faisceau plus costaud.
Une dernière possibilité consiste à diffuser des informations sur le champ de bataille, uniquement visibles par les soldats, afin de les renseigner. Avec la technologie MPLC, on pourrait, par exemple, projeter en infrarouge une forme de croix sur des bâtiments à éviter, un carré sur des positions ennemies et un rond sur un objectif à atteindre. Un peu comme dans un jeu vidéo.