La chose intrigue fortement depuis son premier dévoilement en octobre 2019. Ajoutant un (petit) appareil à sa gamme Surface, Microsoft dévoilait alors le Duo, un smartphone à deux écrans qu'elle présentait comme un concept.
Un concept peut-être, mais aussi l'annonce importante du retour de la firme dans le domaine des téléphones intelligents, après l'échec relativement cuisant de son OS Windows Phone, abandonné en 2017.
Cette fois, c'est sur Android que doigts ou stylets glissent –mais un Android version Seattle, dans lequel Microsoft pense les choses en fenêtres, fidèle à sa vieille philosophie logicielle.
Les mâchoires ont dû suffisamment se décrocher –le design du Surface Duo et les utilisations qu'il laisse imaginer sont, avouons-le, diablement attirantes– pour que Microsoft décide de transformer le concept en produit commercial. En août 2020, l'entreprise annonçait l'arrivée de son papillon high-tech sur le marché américain, pour un tarif de 1.399 dollars.
Techniquement, le Duo ne dispose pas d'un écran pliable comme d'autres appareils concurrents mais de deux écrans «durs», articulés par une charnière de qualité Surface –c'est, nous explique-t-on, un gage de robustesse et la condition sine qua non pour l'utilisation d'un stylet.
De technologie AMOLED, chacun fait 5,6 pouces de diagonale. Plié comme il se doit, l'appareil peut n'être utilisé que sur un écran, comme un smartphone traditionnel. Déployés, les deux écrans offrent en revanche une surface de travail s'étirant jusqu'à 8,1 pouces –pour comparaison, la diagonale de l'écran de l'iPad Mini est de 7,9 pouces.
C'est bien sûr ouvert de cette manière que le Surface Duo révèle ses talents, plutôt inédits. Il ne remplacera bien sûr pas un véritable ordinateur. Mais la vie, et les bouleversements dus à la pandémie, font que nous sommes de plus en plus souvent appelés à travailler sur nos smartphones.
Dans notre bain, entre deux correspondances, sur nos toilettes, dans le wagon-bar, nous multiplions les petites sessions urgentes, pour lesquelles un téléphone semble suffisant, mais se révèle horriblement frustrant.
Avant de pouvoir mettre la main sur l'appareil et de pouvoir procéder à notre propre test, nous avons eu la chance d'assister à une petite démo, effectuée par des cadres de Microsoft engagés sur le projet.
À deux, c'est mieux
L'exercice a bien sûr ses limites. Ces personnes n'allaient bien entendu pas avouer, en larmes, que rien ne fonctionnait, qu'ils avaient été pris en otage par Microsoft pour dire du bien du produit à de parfaits inconnus de l'autre côté du globe.
Ce n'est pas l'objet d'une telle opération marketing et, surtout, ce serait un mensonge: sans préjuger de son utilisation en conditions réelles, il faut avouer que les usages présentés ouvraient des perspectives assez excitantes; nous avons très vite compris à quel point ce deuxième écran était susceptible de bouleverser notre utilisation quotidienne d'un smartphone.
Il a été beaucoup question de productivité, et c'est bien de cela qu'il s'agit. Le Surface Duo et ses deux écrans ont été pensés, pour la vie professionnelle surtout, mais dans des usages personnels aussi, pour accompagner nos cerveaux multitâches, nos attentions multiples et nos activités pluridisciplinaires.
Lisez un article sur un écran, prenez des notes sur l'autre. Prenez connaissance de vos courriels d'un côté, ouvrez un document attaché de l'autre. Regardez un match de foot à gauche, consultez les statistiques à droite. N'arrêtez plus le visionnage d'un film pour consulter sa fiche Wikipedia. Voyez à la fois le visage de vos interlocuteurs et le tableau Excel dont ils sont en train de débattre âprement.
Et caetera: faire plusieurs choses à la fois, y compris sur son smartphone, n'a bien sûr plus rien de révolutionnaire. Pouvoir le faire de manière plus fluide, plus confortable, plus naturelle que sur un appareil à écran unique peut changer la donne; les travailleurs et travailleuses dotées d'un second écran savent à quel point la vie se simplifie lorsque l'on peut étaler les fenêtres, plutôt que de devoir les empiler.
La donne changera-t-elle? Certains des premiers tests américains du Surface Duo ont été positifs mais réservés, notant la grandeur des idées mais leur application parfois approximative, un hardware interne déjà vieillissant pour un prix piquant quelque peu, une caméra faiblarde et quelques bugs enquiquinants.
Mais si ses entrailles n'ont pas bougé, le Surface Duo a, sur le plan logiciel, quelque peu évolué depuis sa sortie américaine. Certains pépins logiciels ont été gommés, l'intégration de la philosophie Windows à la mécanique Android a été affinée et, surtout, de nombreux développeurs externes ont adapté leurs applications pour un véritable usage sur deux écrans.
C'est sur cette machine plus mature, et dont l'évolution n'est pas achevée, que nous pourrons bientôt essayer de prendre nos aises, tester ou découvrir des usages que nous n'imaginions pas, ou nous arracher les cheveux du fait de limitations flagrantes. Verdict le 18 février, date à laquelle le Surface Duo sera mis sur le marché français au prix public de 1549 euros pour la version 128 Go et 100 euros de plus pour doubler sa capacité.