L'agence spatiale américaine vient d'allouer le 5 mai 500.000 dollars supplémentaires à un projet de radiotélescope géant destiné à «sonder l'aube de l'univers».
Sa particularité? Il n'est situé ni dans l'espace, comme Hubble ou le futur James-Webb, dont le lancement est prévu en fin d'année, ni sur Terre comme le VLT (Very Large Telescope), qui scrute le ciel à 2.600 mètres d'altitude dans le désert chilien, mais... sur la Lune.
Le LCRT (Lunar Crater Radio Telescope), imaginé en 2020 par l'ingénieur en robotique Saptarshi Bandyopadhyay, serait construit à l'intérieur d'un cratère situé sur la face cachée de la Lune. Son immense antenne parabolique de plus d'un kilomètre de diamètre en ferait le plus grand radiotélescope du système solaire.
Mais pourquoi diable aller construire un télescope sur la Lune, qui nécessite l'envoi de coûteux matériel dans l'espace? C'est que le LCRT vise à mesurer les ondes radio générées par l'âge sombre de l'univers. Celui-ci correspond à la période de quelques centaines de millions d'années après le Big Bang durant laquelle l'univers ne contient pas encore d'étoiles.
Or, sur Terre, les longueurs d'onde correspondant à cet âge primitif sont réfléchies par toutes sortes d'interférences: signaux radio, ionosphère, satellites, et bruit radio produit par le Soleil, détaille Saptarshi Bandyopadhyay. La Lune agit comme un bouclier contre toutes ces interférences et, de surcroît, n'a pas d'atmosphère.
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Pour être sensible à ces grandes longueurs d'onde (supérieures à 10 mètres), le télescope devrait toutefois être énorme. Même avec ses 500 mètres de diamètre, le Five-hundred-meter Aperture Spherical Telescope (FAST), le plus grand téléscope terrestre, n'est pas sensible aux longueurs d'onde supérieures à 4,3 mètres.
Le LCRT devrait mesurer plus d'un kilomètre de diamètre. Sauf que transporter des milliers de panneaux réfléchissants extrêmement lourds ne serait tout simplement pas rentable.
Le projet vise donc à suspendre un mince treillis métallique de panneaux à l'intérieur d'un cratère de 3 kilomètres de large, afin de rendre la surface entière réfléchissante. «Un vaisseau spatial livrerait le maillage et un atterrisseur séparé déposerait des rovers DuAxel [des petits robots actuellement en développement capables d'escalader les parois rocheuses] pour assembler l'antenne», précise l'ingénieur.
Bien que le projet vienne de passer en phase II, il semble encore très hypothétique. Même sans tenir compte du coût astronomique d'une telle antenne, celle-ci devrait être capable de résister aux changements brutaux de température, de -173°C à 127°C, sans se déformer.
De plus, si la face cachée de la Lune est pour l'instant «radio-silencieuse», cela pourrait bien changer à l'avenir avec les projets lunaires en cours de développement. D'ailleurs, les 500.000 dollars alloués par la NASA ne serviront pour l'instant qu'à «identifier de nouveaux défis» –qui ne manqueront pas.