Le «ciseau génétique» développé par Crispr Therapeutics a jadis fait la une de tous les médias, mais ses résultats thérapeutiques sont, pour l'instant, encore limités. Il promettait de guérir les maladies héréditaires. Jusqu'ici, une seule patiente a vu son état s'améliorer grâce à Crispr.
Ces lenteurs sont dues aux limitations de l'outil: Crispr permet de détruire un gène défectueux, mais pas de le remplacer par un gène sain. Cette opération est précisément ce qu'un nouvel outil développé par la start-up Tessera Therapeutics pourrait être capable de réussir. Il s'agit, en somme, de passer de «l'édition de l'ADN» à son «écriture».
«L'écriture de gènes est [aujourd'hui] capable de faire des suppressions parfaites ou de simples changements de paires de bases. Mais l'enjeu, c'est le spectre complet, et en particulier la possibilité d'apporter de grandes modifications au génome», explique Geoffrey von Maltzahn, fondateur de Tessera Therapeutics.
Réparer le génome par une simple injection
Certains gènes ont la particularité de se déplacer et de se répliquer sans le reste de leur génome: on les appelle «éléments génétiques mobiles». Un article scientifique paru en 2017 a démontré que certains d'entre eux sont capables de «couper», «copier» et «coller» des séquences d'ADN.
Selon les personnes à l'origine de l'article, Peters et Koonin notamment, ces phénomènes pouvaient «potentiellement être exploités pour des applications d'ingénierie du génome». Ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd: comme le relate Wired, le téléphone des deux scientifiques s'est rapidement mis à sonner.
Deux types d'éléments génétiques mobiles intéressent Tessera Therapeutics. Les transposons, apparentés à de l'ARN, peuvent «sauter» d'une séquence d'ADN à un autre. Les rétrotransposons, quant à eux, ont la faculté de se «répliquer» et d'implanter ces copies dans une autre séquence d'ADN, l'agrandissant au passage.
Les équipes de la firme ont identifié environ 6.000 transposons (pouvant «écrire» de l'ADN) et 2.000 rétrotransposons (pouvant «écrire» de l'ARN), dont le potentiel est jugé intéressant pour, par exemple, «réparer» l'ADN d'une personne atteinte d'une maladie héréditaire en modifiant une séquence génétique.
Grâce à eux, et pour la première fois en thérapie génique, Tessera Therapeutics peut désormais modifier le génome d'un être vivant «en direct» par une simple injection d'ARN.