Sur Google Maps, lorsque l'on zoome sur Israël, la bande de Gaza ou les Territoires palestiniens de Cisjordanie, les images sont étonnament floues. Sans s'éloigner d'Israël, un zoom sur les grandes villes d'Amman en Jordanie ou de Beyrouth au Liban permet de distinguer les voitures dans les rues et les détails des bâtiments. En Israël et en Palestine, seul un amas de pixel est disponible.
Pourtant, dans un post de blog expliquant le fonctionnement de Maps, Google explique que le «but est de régulièrement actualiser les endroits densément peuplés afin de rester à jour avec un monde changeant». Des grandes villes comme Gaza ou Jérusalem, qui comptent des centaines de milliers d'habitants, semblent correspondre à cette description.
Ce flou est en réalité la conséquence d'une loi américaine datant de 1997. Alors que les images satellitaires devenaient plus précises et facilement accessibles, l'État d'Israël s'est inquiété des conséquences sur sa sécurité. Les États-Unis ont donc adopté l'amendement Kyl-Bingaman (KBA), qui interdit aux entreprises américaines de proposer des images plus précises que celles fournies commercialement par les entreprises étrangères.
Étant donné que les principaux services de cartographie satellite appartiennent à des entreprises américaines (Google, Apple, Microsoft), les images disponibles sont encore en basse définition aujourd'hui.
Précieuse précision
Si la loi ne concernait qu'Israël, les services de cartographie ont fait le choix de l'appliquer aussi aux Territoires palestiniens. KBA interdisait qu'un pixel puisse représenter moins de 2 mètres, ce qui rend une voiture à peine visible et tout ce qui est plus petit impossible à distinguer.
Mais tout le monde ne se réjouit pas de ces restrictions. Des archéologues et des géographes estiment que KBA freine les recherches scientifiques dans la région et des ONG ou journalistes affirment que ce flou satellite empêche de suivre précisément l'installation des colonies israéliennes dans les territoires occupés et de géolocaliser les frappes israéliennes à Gaza.
À gauche, une image satellite de Gaza sur Google Maps. À droite, une image satellite de Paris sur la même plateforme.
Tout cela est en passe de changer, car des images plus précises que celles de Google sont aujourd'hui disponibles, notamment produites par Airbus. En juillet 2020, des archéologues d'Oxford sont parvenus à obtenir un allègement des restrictions, afin de passer à des pixels de 40 centimètres minimum.
Israel a dénoncé cette décision, estimant que cela pourrait aider le Hamas et le Hezbollah à mieux viser les cibles de leurs roquettes.
Interrogée par la BBC, Apple a affirmé qu'elle travaillait à actualiser rapidement ses images. De son côté, Google a expliqué qu'elle «réfléchissait à rafraîchir ses images satellites», mais qu'elle n'avait «pas encore de projet à annoncer».