Visiter de nos jours un laboratoire cherchant à fabriquer un ordinateur quantique revient à retourner dans les années 1960, à l'époque où les premiers ordinateurs voyaient le jour dans les universités américaines: des fils partout, d'innombrables machines gigantesques et des armées de technicien·nes s'affairant à la tâche.
Pourquoi leur mission est-elle si compliquée? Comme son nom l'indique, un ordinateur quantique tire parti des lois de la mécanique quantique. Cette théorie décrit les phénomènes physiques à l'échelle atomique et traduit la possibilité pour une molécule ou un atome de se trouver en différents états en même temps –on parle alors d'«états superposés».
Avec un ordinateur classique, les informations sont codées sous la forme de bits ne pouvant prendre que deux valeurs, 0 ou 1, alors que les qubits des ordinateurs quantiques pourraient prendre simultanément les deux valeurs, 0 et 1.
Voici l'équation à laquelle font face les scientifiques, complexe à saisir pour le public non initié car ne fonctionnant pas selon la même logique que le monde dans lequel nous évoluons.
Architecture évolutive
Pour tenter de créer un ordinateur capable d'une telle prouesse, l'option la plus courante est de placer le plus de qubits possible sur une même puce, une stratégie de force brute notamment adoptée par Google ou IBM.
Robert Schoelkopf, qui a fondé en 2017 la start-up Quantum Circuits, emprunte une voie moins orthodoxe: le professeur à l'université de Yale considère qu'il faut penser l'ordinateur quantique comme une sorte d'assemblage de Lego.
Au lieu de construire une seule et large machine, il s'agirait de créer une série de petites unités pouvant se connecter entre elles. Selon le spécialiste, cette approche modulaire permettrait de donner à l'ordinateur quantique une architecture évolutive, de réduire les erreurs de calcul et donc de proposer des calculateurs plus puissants pour un coût moindre.
Grâce à un petit boîtier en aluminium contenant des circuits supraconducteurs en silicone, Quantum Circuits espère dépasser la puissance d'une plus grande machine en utilisant à son bénéfice le principe de la téléportation quantique.
Les travaux de recherche de Robert Schoelkopf et ses acolytes semblent tout droit sortis d'un épisode de Star Trek. Mais qui a dit qu'une petite équipe aux idées inconventionnelles ne pouvait pas battre les géants de la tech?