Modifier la planète pour freiner le changement climatique est une idée qui gagne de plus en plus de terrain dans la communauté scientifique. En mars 2019, le sujet a même été débattu lors de la quatrième Assemblée des Nations unies pour l'environnement, qui s'est déroulée à Nairobi au Kenya. Parmi les projets évoqués par les géo-ingénieur·es: bloquer le Soleil.
Ce ne serait théoriquement pas très difficile, avancent quelques scientifiques. Il suffirait d'imiter le phénomène naturel qui se produit lors d'une éruption volcanique et obscurcit le ciel, c'est-à-dire d'envoyer des milliards de particules de soufre dans la stratosphère, près de l'équateur.
Les particules se propageraient dans le ciel du monde entier en quelques semaines et resteraient dans l'air pendant plusieurs mois, réfléchissant quelques rayons du Soleil d'où ils viennent. L'effet serait théoriquement immédiat, temporaire et redoutablement efficace: la température de la planète refroidirait en quelques semaines, plutôt que d'attendre des décennies.
Le problème est que les scientifiques qui travaillent sur le sujet n'ont aucune idée des effets secondaires qu'une telle expérience pourrait entraîner. Le dioxyde de soufre (SO2) est, comme le dioxyde de carbone, source de conséquences extrêmement néfaste.
Brûler les carburants fossiles relâche déjà des millions de tonnes de SO2 dans l'atmosphère et tue environ 4 millions de personnes par an dans le monde en entraînant maladies cardiaques, respiratoires ou cancer des poumons.
Apprentis sorciers
Le SO2 refroidit certes la planète, mais il provoque dans le même temps des pluies acides qui détruisent les forêts et grignotent les pierres de cathédrales. Quant au blocage de la lumière, même très partiel, pourrait-il avoir des effets dramatiques sur l'écosystème planétaire, notre santé ou nos sociétés? L'imaginaire qui entoure les mondes plongés dans le noir suffit à comprendre que vivre sans lumière réveille une panique existentielle ancestrale chez l'être humain.
Pour le moment, bien sûr, l'idée n'en est qu'au stade théorique. Les recherches sont peu financées et limitées à des calculs de modélisation. Seuls quelques laboratoires conduisent des expériences. Harvard, par exemple, réalise des tests pour voir si cette théorie pourrait fonctionner avec d'autres composants chimiques, comme le carbonate de calcium.
Mais les données sont déjà très claires sur un point: la géo-ingénierie solaire n'est pas seulement faisable, elle pourrait s'avérer être une aubaine financière pour les pays disposant des moyens de se lancer dans une telle entreprise.
Réduire les émissions de CO2 coûte des milliards de milliards de dollars chaque année. Un programme relâchant du soufre pour diminuer les températures moyennes de 0,1 degré coûterait moins de 5 milliards de dollars par an; les calculs pourraient être vite faits.