Depuis des mois et le début de sa calamiteuse invasion de l'Ukraine, le chiffon rouge de l'intervention nucléaire ne cesse d'être agité par Vladimir Poutine. Et le maître du Kremlin, qui jure ses grands dieux qu'il ne bluffe pas, est pris au sérieux.
Le 6 octobre, le président américain Joe Biden lui-même parlait d'un risque d'«Armageddon» pour le monde. Le patron de la CIA, de son côté, semblait assez peu sûr des intentions réelles de Poutine en matière atomique, plusieurs scénarios étant possibles.
Alors, l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) se prépare. Comme elle le fait chaque année, sans y couper malgré l'ambiance pour le moins tendue avec le rival de l'Est, elle s'apprête à tenir en Europe son opération «Steadfast Noon» (dont le nom de baptême est expliqué ici), une série d'exercices destinés à tester la préparation de ses membres à une éventuelle action atomique.
Prévue du 18 au 26 octobre, «Steadfast Noon» doit réunir les forces armées de quatorze des pays membres de l'organisation –mais pas de la France, qui fait cavalier seul et dont le président Emmanuel Macron a rappelé la doctrine lors d'une allocution mercredi 12 octobre.
Valse atomique
Seront concernés des aéronefs à capacité nucléaire (mais ne portant pas d'armes réelles), des avions de ravitaillement ou de commandement et de surveillance, et l'ensemble des bases aériennes et personnels leur étant liés.
C'est donc une démonstration de force de la part de l'OTAN. Un «exercice pour nous assurer que notre dissuasion nucléaire demeure sûre, sécurisée et efficace», a indiqué le secrétaire général de l'organisation, Jens Stoltenberg, lors d'une conférence de presse, qui a précisé qu'aucune mission ne serait menée à moins de 1.000 kilomètres du territoire russe.
D'après lui, comme selon les services de renseignement britannique ou américain, la Russie ne montre pour l'instant aucune activité pouvant amener à penser qu'elle se prépare à une escalade vers le pire –l'utilisation d'une arme nucléaire tactique contre l'Ukraine, par exemple.
Mais l'OTAN, ajoute-t-il, reste vigilante, prête à répondre en cas d'attaque de l'un de ses membres. Annuler l'opération «Steadfast Noon» constituerait, dans les circonstances actuelles, l'envoi d'«un très mauvais signal» à Moscou, à qui il a déjà été fait «clairement comprendre que les conséquences seraient sévères» si elle utilisait l'arme nucléaire, de quelque manière que ce soit.
«Le comportement ferme, prévisible, la force militaire de l'OTAN est le meilleur moyen d'éviter l'escalade, estime Jens Stoltenberg. Si nous créons maintenant le terreau d'incompréhensions et de mauvais calculs de la part de Moscou quant à notre volonté de protéger et défendre nos alliés, nous augmenterons ce risque d'escalade.» Bref: personne ne veut, mais tout le monde se tient prêt, au cas où.