Une équipe internationale de chercheurs, dirigée par Alexander Goncharov de la Carnegie Institution de Washington, a fait une découverte qui va révolutionner le stockage d'énergie et le secteur de la propulsion, notamment des fusées. Publiée le 21 avril dans la revue scientifique Nature, une étude révèle en effet la création d'un nouveau matériau explosif de synthèse aux propriétés étonnantes.
Nom de code: K 2N 6. Il se compose de deux atomes de potassium ainsi que de six atomes d'azote formant un anneau. Car la star des explosions en tous genres, c'est l'azote. Avec l'hydrogène et l'hélium, c'est l'un des éléments les plus communs dans l'univers; on le retrouve dans la plupart des explosifs chimiques, du TNT à la poudre à canon en passant par la dynamite.
Mais alors, comment se crée l'explosion? Un atome d'azote possède trois électrons non appariés, qui forment des liaisons chimiques.
Lorsque deux atomes d'azote se rencontrent, ils deviennent la molécule de gaz N 2 (diazote), créant de l'énergie.
L'attraction entre eux est si forte que, malgré l'abondance d'azote dans l'atmosphère terrestre, ils ne font presque jamais rien d'autre que flotter, sans rencontrer les autres éléments. Mais lorsqu'on les manipule à une pression beaucoup plus haute que la normale, leur potentiel explosif se révèle…
Scientifiques sous pression
Pour réaliser ce pas vers la création d'un atome d'azote pur, l'équipe de Goncharov a porté un précurseur d'azote contenant du potassium à environ 450.000 fois la pression atmosphérique, puis l'a chauffé avec de puissants lasers infrarouges pour induire la synthèse d'un nouveau composé.
Le résultat? Un matériau cristallin avec un éclat métallique composé d'une série d'anneaux hexagonaux d'azote pur, stabilisés par des atomes de potassium intercalés.
«Notre composé nouvellement formé est stable sous des pressions d'environ la moitié de celles sous lesquelles il a été formé, explique Alexander Gontcharov, directeur de l'étude. Cela signifie que nous n'avons pas encore atteint une forme de polyazote pur qui pourrait être utilisé pour des applications pratiques.»
Car pour pouvoir se servir des propriétés exceptionnelles de ce nouvel explosif de synthèse, il faudrait qu'il puisse rester stable à une pression normale –une pression atmosphérique.
C'est d'ailleurs en ça que le monde de la chimie à haute pression est formidable: il donne la possibilité d'expérimenter des états de la matière inédits. Si elle n'est pas encore utilisable en pratique, cette découverte permet de démontrer l'existence d'un tel matériau, et d'avancer vers une éventuelle révolution dans le stockage de l'énergie et les matériaux propulseurs. Un premier pas, puis boum?