Le programme du F-35 est, cela ne fait aucun doute, une douloureuse épine dans le pied du Pentagone. Défauts innombrables et parfois rédhibitoires, qualités guerrières intrinsèques douteuses, le désastre industriel semble patent.
Cela n'empêche pas la puissance commerciale et diplomatique des États-Unis de faire leur œuvre, comme l'a récemment prouvé le choix par la Suisse du chasseur de Lockheed Martin –une sélection qui pourrait d'ailleurs être contestée.
Notre voisin alpin a, croit-on savoir, les poches plutôt profondes. Elle a plutôt intérêt, semble-t-il: selon un rapport du Gouvernement Accountability Office américain (GAO), sorte de Commission des finances ou de Cour des comptes du Congrès, les coûts d'entretien et d'opération de l'engin gonflent à une vitesse inquiétante.
Ils croissent même si vite que le Pentagone n'aura bientôt d'autres choix que de réduire ses commandes (2.500 au total, pour une somme estimée à 400 milliards de dollars), ou les heures de vol de l'avion.
Le gouffre
«Les forces armées font collectivement face à des dizaines de milliards de dollars supplémentaires en coûts d'entretien, dont elles projettent qu'ils finiront par être inabordables», est-il ainsi écrit dans le rapport, repris par Defense News.
«L'Air Force a par exemple besoin de réduire les coûts annuels d'entretien de 3,7 millions de dollars par avion d'ici 2036, au risque de voir la dépense totale dépasser de 4,4 milliards de dollars ce qu'elle peut se permettre.»
Avec un coût global estimé à 1.700 milliards de dollars, financés en grande partie par le contribuable américain, et si le prix de l'entretien du vrai-faux bijou technologique américain ne baisse pas, le programme du F-35 pourrait au total représenter un trou annuel supplémentaire de 6 milliards de dollars pour le Department of Defense.
Comme le note Defense News, ce rapport du GAO, qui certes ne porte historiquement pas le F-35 dans son cœur, est un clou supplémentaire dans le cercueil d'un programme qui pourrait assez vite être purement et simplement sabré: le désastre est tel que l'US Air Force, à mots à peine couverts, lui réclame déjà un remplaçant un peu plus capable, et beaucoup moins dispendieux.
«Les officiels de l'Air Force ont noté que, même s'ils arrivaient d'une manière ou d'une autre à obtenir gratuitement toutes les pièces détachées de sa flotte de F-35, les coûts d'entretien de l'avion seraient toujours 14% plus élevés que ce qu'elle peut se permettre», écrit Defense News, qui note néanmoins que les autres forces semblent moins pessimistes sur la capacité du programme à faire baisser ses coûts.