Propre et virtuellement infinie, la fusion est le Graal énergétique d'un avenir encore sans doute trop lointain, mais dont les perspectives réjouissantes se précisent d'année en année. ITER, SPARC, les start-ups Commonwealth Fusion Systems, Tokamak Energy ou General Fusion pour n'en citer que trois, le Lawrence Livermore National Laboratory en Californie, HL-2M en Chine: les projets expérimentaux ne manquent pas, et les résultats encourageants s'enchaînent.
Il est en ainsi du «stellarator» Wendelstein 7-X, basé à Greifswald, en Allemagne, et dont les concepteurs, l'Institut Max-Planck de physique des plasmas, ont annoncé qu'il semble capable d'animer et contenir un plasma dont la température pourra atteindre deux fois celle du soleil.
Le stellarator est, comme l'explique New Atlas, un design de réacteur concurrent à celui, mieux connu et plus répandu, du tokamak. C'est au sein du stellarator comme du tokamak que les scientifiques du monde entier cherchent à reproduire le fonctionnement intime du soleil: on y produit un plasma qui, soumis à des pressions et températures dantesques, finit par forcer les atomes à fusionner –et, en théorie, à produire au passage une quantité colossale d'énergie.
Mais, tandis que le tokamak a la forme relativement sobre et régulière d'un donut (une forme dite toroïdale), le stellarator est lui beaucoup plus complexe: ce sont des rubans et entrelacs de bobines supraconductrices dites «poloïdales» et alimentée par un courant fort qui ont la charge de contenir la réaction autour d'une chambre de confinement plus tarabiscotée.
Le Wendelstein 7-X a été mis en service en 2015. En 2018, les scientifiques de l'Institut Max-Planck annonçaient déjà de prometteurs records de densité d'énergie, expliquant à l'époque avoir réussi à faire atteindre une température de 20 millions de degrés centigrades –c'était déjà 5 de plus que le cœur de notre Soleil.
Chaud chaud chaud
C'est certes loin du récent record annoncé par la Chine pour son «soleil artificiel», un HL-2M qui aurait atteint plus de 120 millions de degrés pendant une période de 101 secondes. Le stellarator allemand présente néanmoins d'autres qualités, notamment une beaucoup plus grande régularité théorique que les réacteurs basés sur la formule du tokamak comme le HL-2M.
Surtout, le Wendelstein 7-X est loin de sa pleine capacité: il pourrait à l'avenir atteindre des températures bien plus élevées que celles approchées en 2018, et sans doute dépasser les 40 millions de degrés, soit deux fois la chaleur du cœur solaire.
Pour s'assurer de tels chiffres, les scientifiques doivent apprendre à juguler un problème inhérent à la fusion, et auquel les stellarators sont particulièrement exposés: une perte de chaleur liée à un phénomène nommé «transport néoclassique», dans lequel une partie des particules mises en jeu est éjectée hors du champ magnétique lors de leur collision.
Associés à ceux du Princeton Plasma Physics Laboratory, les scientifiques de l'Institut Max Planck ont utilisé des techniques d'analyse spectrométrique pour confirmer que le design et les optimisations de leur engin, conçu avec l'aide de force de super-calculateur, permettait de limiter cette perte: c'est, semble-t-il, le cas, comme ils l'ont expliqué dans Nature, et c'est une excellente nouvelle pour la suite du projet.