On l'a surnommée la «Tsar Bomba». De son vrai nom RDS-220, cette bombe à hydrogène de 8 mètres de long et 2 mètres de haut a produit l'explosion nucléaire la plus puissante jamais produite sur Terre.
À l'occasion du 75e anniversaire de l'industrie nucléaire russe, une vidéo de cet événement hors-normes vient d'être déclassifiée par la Russie. Le 30 octobre 1961, cette bombe a été larguée près de l'île Severny, dans la mer de Barents à l'extrême nord de la Sibérie.
Après une vingtaine de minutes dédiées à vanter cette technologie monstrueuse, on peut voir un bombardier spécial, le Tu-95V Soviet, larguer la «Tsar Bomba» au-dessus de l'île. S'ensuit un flash aveuglant puis un immense champignon de fumée s'élevant dans le ciel.
Hiroshima x 3.800
La bombe, d'une puissance équivalente à 50 millions de tonnes de TNT (soit 3.800 fois celle d'Hiroshima), a explosé à 4.000 mètres au-dessus de la mer. Le nuage de fumée forme un champignon de 90 km de diamètre et 67 km d'altitude, visible à plus de 1.000 kilomètres à la ronde malgré le temps nuageux. La BBC rapportait en 2017 que l'explosion avait détruit tous les bâtiments dans un rayon de 55 km, l'onde de choc faisant trois fois le tour de la Terre.
Grâce à la présence de deux avions accompagnateurs, la détonation est visible depuis plusieurs angles. Le documentaire, une pure propagande soviétique, ose même parler de «bombe à hydrogène propre», car l'explosion aurait été paramétrée pour minimiser les radiations.
Le film montre ainsi des scientifiques arriver «quelques heures» après l'explosion à bord d'un hélicoptère Mi-4 spécialement équipé de systèmes de détection des radiations. Ils débarquent sans protection, car «même au centre du site, [les radiations] étaient insignifiantes», explique le narrateur, qui ajoute que la terre a été brûlée sur des «dizaines de kilomètres» et la neige entièrement vaporisée.
Bien trop dévastatrice et encombrante pour être utilisée en temps de guerre, la «Tsar Bomba» n'a jamais connu de suite. Le test effectué en 1961 a d'ailleurs été l'un des derniers réalisés en plein air, les États-Unis et la Russie ayant signé un traité en 1963 stipulant que les essais nucléaires devaient à présent être réalisés sous terre.
Bien qu'elle n'apporte aucune information cruciale, la vidéo offre un aperçu du contexte de la Guerre froide et de la course à l'armement. Le plus gros engin nucléaire jamais déclenché par les États-Unis est celui mis à feu lors de l'essai de Castle Bravo dans l'atoll de Bikini, situé dans le Pacifique, le 1er mars 1954.
L'explosion avait alors atteint une puissance de 15 mégatonnes. Un chiffre bien en-deça de l'essai soviétique, bien que la détonation ait été à l'époque accidentellement amplifiée par une erreur de calcul des concepteurs.