Le message, s'il s'agit bien d'une attaque ukrainienne –ce qui n'est pas encore confirmé–, est clair: nous sommes capable de frapper loin, très loin derrière vos frontières historiques, et nous ne nous priverons pas de le faire.
Lundi 5 décembre à 6h du matin, les blogueurs militaires et médias russes rapportaient ainsi, vidéos à l'appui, que l'aérodrome militaire d'Engels-2, dans les environs de Saratov (ouest de la Russie), avait été touché par une attaque.
Selon un bilan confirmé côté russe, trois personnes sont mortes. En outre, au moins deux bombardiers stratégiques Tu-95 «Bear» auraient été endommagés. Christo Grozev, l'un des fondateurs de l'excellent site d'investigation en open source Bellingcat, rapportait quant à lui que le reste des aéronefs présents à Engels-2 avait décollé et fui la base, sans doute pour se protéger d'une éventuelle seconde vague d'attaques.
Une autre cible a par ailleurs été touchée: un dépôt de carburant à proximité de la base militaire Riazan, à 200 kilomètres seulement au sud-ouest de Moscou et où opèrent également des bombardiers russes Tu-95 et Tu-22M.
[ 🇷🇺 RUSSIE | 🇺🇦 UKRAINE ]
— (Little) Think Tank (@L_ThinkTank) December 5, 2022
🔸 Vidéo présumée d'une explosion sur la base aérienne d'Engels-2, dans la région de Saratov, en Russie. Plusieurs informations indiquent qu'un drone serait tombé et aurait endommagé 2 bombardiers russes Tu-95, avions utilisés pour bombarder l'Ukraine. pic.twitter.com/ephjcdDh0b
After reports in Russian military channels that Ukraine drones destroyed two strategic Tu-95 bombers and crew deep in Russia's rear, in Engels, now Ukraine reports that 14 other Tu-95 have taken off from that military airport. Could be a revenge attack, or just keeping them safe.
— Christo Grozev (@christogrozev) December 5, 2022
L'aéroport d'Engels-2, situé à plus de 800 kilomètres de Kharkiv, est loin d'être inconnu: c'est notamment de ses pistes que décollent ces fameux avions, des bombardiers Tu-95 mais également des Tu-160 «Blackjack».
Tu-95 comme Tu-160 sont les engins notamment chargés de faire pleuvoir sur l'Ukraine les missiles Kh-101 qui, sans relâche malgré des stocks que l'on dit proches de l'épuisement, détruisent les infrastructures énergétiques ukrainiennes et s'abattent sur des populations civiles sans défense.
The #German magazine Spiegel has published satellite images from the #Russian airfield Engels-2 near #Saratov.
— NEXTA (@nexta_tv) December 1, 2022
The publication believes that they are preparing for a new missile attack on #Ukraine. pic.twitter.com/SIxJXXnFbb
Plus loin, plus fort
Il serait donc tout à fait logique –pour ne pas dire légitime– que Kiev cherche à atteindre ces vecteurs de mort, où qu'ils soient. Problème: la base d'Engels-2 comme celle de Riazan sont beaucoup trop loin à l'intérieur du territoire russe pour avoir été touchées par des missiles lancés par les forces ukrainiennes.
Même les ATACMS, missiles balistiques que l'Ukraine réclame à cor et à cri à Washington mais que cette dernière rechigne à lui fournir, sont loin de pouvoir atteindre des cibles si lointaines –leur portée maximale est de 200 kilomètres.
Alors, une rumeur bruisse, non confirmée ce lundi midi mais reprise (entre autres) par les médias russes: des drones auraient mené l'attaque, et leur portée pourrait indiquer que l'armée de Kiev a désormais la capacité de frapper beaucoup plus profondément en Russie qu'elle ne l'avait fait jusqu'à maintenant.
Quels drones seraient capables d'une telle puissance? Le site spécialisé The Aviationist note que la firme ukrainienne Ukroboronprom a annoncé en octobre dernier avoir développé et testé avec succès un appareil suicide capable d'emporter une charge de 75 kilogrammes à 1.000 kilomètres de distance.
Coïncidence sans doute, une porte-parole de la compagnie, Natalia Sad, déclarait ce dimanche 4 décembre: «Après avoir testé le drone avec succès dans des conditions de guerre électronique, nous espérons pouvoir faire un essai en combat. Nous avions promis de le faire avant la fin de l'année, et nous espérons tenir cette promesse.»
À la stupéfaction de tous, et en particulier de la Russie, c'est peut-être chose faite –bien que, depuis l'attaque, nombre d'analystes pointent la possibilité que de vieux Tu-141, drones datant de l'ère soviétique, possiblement modifiés pour porter une charge explosive, aient été responsables des attaques.
Alexander Kots says that Tu-141 Strizh UAVs were used to attack Engels airbase. If they were actually launched from Ukraine and managed to strike a target that deep in Russian territory, there will likely be some serious questions of Russian PVO.https://t.co/fEOfONf3xj pic.twitter.com/szn8JgRg7s
— Rob Lee (@RALee85) December 5, 2022
Mais, conséquence ou non de l'attaque, Moscou n'a pas tardé à relancer sa campagne de bombardement: dans la journée du lundi 5 décembre, de nouvelles attaques étaient rapportées sur l'ensemble du territoire ukrainien, frappant notamment Odessa.
Air sirens are sounding all over #Ukraine 🇺🇦, as #Russia is reported to have launched dozens of missiles from the Caspian Sea.
— Thomas van Linge (@ThomasVLinge) December 5, 2022
For the past weeks Monday has usually been a day of missile attacks on the Ukrainian energy infrastructure. pic.twitter.com/v61fv7DgDc
BREAKING:
— WhereisRussiaToday (@WhereisRussia) December 5, 2022
🇷🇺Missile strikes reported in #Odesa 🇺🇦
Electricity issues are now being reported. #Russia #Ukraine pic.twitter.com/Vpdh3G4Ixn
[ 🇷🇺 RUSSIE | 🇺🇦 UKRAINE ]
— (Little) Think Tank (@L_ThinkTank) December 5, 2022
🔸 Vidéo d'un missile de croisière russe au-dessus de la région de Dnipro. pic.twitter.com/r0CfvDRpBC