Après les AMX-10 RC français, les Bradley américains ou les Marder allemands, après la centaine de Stryker annoncés par Washington, avant peut-être l'annonce de l'envoi d'avions de combat qui semblent devoir être des F-16, est venue la semaine cruciale où les alliés occidentaux de l'Ukraine se sont décidés à surmonter leurs réticences ou divisions pour fournir au pays des chars lourds, des Abrams ou des Leopard 2, afin de se préparer à la reprise des territoires conquis par l'envahisseur russe.
Momentum is growing after Germany finally decided to send tanks to Ukraine.
— Janek Lasocki (@JanekLasocki) January 25, 2023
These are numbers of Leopards countries are reporting to be planning to send:
🇩🇪 14
🇵🇱 14
🇳🇱 18
🇵🇹 4
🇪🇸 53
🇳🇴 + 🇫🇮 tbc
🇸🇪 Stridsvagn
🇺🇸 30 Abrams tanks#RussiaUkraineWar #LeopardsAreFree pic.twitter.com/aGPP0l8uX2
Mieux vaut tard que jamais, explique en substance George Barros de l'Institute For the Study of War (ISW) à Newsweek. La partie la plus importante de l'expression est peut-être, en l'occurrence, le mot «tard».
Selon l'analyste, les tergiversations occidentales ont fait perdre un temps précieux à Kiev et l'ont empêché de profiter d'une «fenêtre d'opportunité» lors de laquelle l'armée russe, encore groggy des rugissantes contre-offensives de Kherson et de Kharkiv, était (et reste) dans une situation de faiblesse exceptionnelle.
«Les Ukrainiens envoyaient le signal de leur intention de procéder à des opérations offensives pendant l'hiver, mais le manque d'assistance de l'Ouest a dégradé leur capacité à les mener», déclare George Barros au média américain.
Selon son analyse, même les contre-offensives dans l'est et le sud du pays auraient pu avoir lieu plus tôt si les armes nécessaires à leur préparation, en particulier les si précieux lance-missiles Himars, avaient été livrées avant.
«Une provision plus tôt de toute l'aide militaire nécessaire aurait pu mener à une libération plus rapide de Kherson, mais les débats politiques internes aux pays occidentaux nous ont menés à donner trop peu, trop tard à l'Ukraine, explique Barros. C'est cette hésitation de certaines capitales, pas le fait de livrer les armes, qui fait que le conflit se prolonge.»
Le lièvre et le Léopard 2
Selon lui, les alliés de l'Ukraine sont trop sensibles aux menaces répétées de la Russie de procéder à une escalade du conflit en cas de livraison d'armes, et ce depuis le véritable début de la guerre, en 2014.
À chaque nouveau pas franchi par les capitales occidentales, Moscou annonce de nouvelles catastrophes et celles-ci ne viennent pas, ou seraient venues quand même, mais la duperie russe répétée à chaque phase de la guerre ralentit le soutien à Kiev.
«À chaque fois que nous évoquons l'idée de fournir quelque chose de nouveau, la Russie prétend que c'est une “ligne rouge” à ne pas franchir. Puis, une fois que nous avons finalement envoyé à l'Ukraine ce dont elle a besoin, nous réalisons qu'on aurait dû le faire des mois plus tôt.»
L'exemple des chars lourds est le plus criant: si leur envoi a été annoncé et pourrait s'avérer plutôt massif, leur arrivée sur le front avec des équipages entraînés et une logistique prête à suivre n'interviendra pas avant quelques mois. Pendant ce précieux temps, la Russie peut entraîner ses nouveaux mobilisés, voire préparer une nouvelle phase d'appel sous les drapeaux, ce qui mènera à un conflit plus meurtrier et de plus longue durée.
«Les Russes se préparent à une guerre longue, et le plus tôt l'Ukraine pourra chasser leurs armées alors qu'elles sont encore dans un relatif état de faiblesse, le mieux ce sera», poursuit Barros.
La conclusion d'une telle analyse est plutôt simple. Afin de procéder à ses prochaines contre-offensives, voire éventuellement tenter de reprendre la Crimée, ou pour résister à celles que pourrait mener la Russie, l'Ukraine a besoin d'autres armes.
Pour dégrader dans la distance la logistique russe et préparer le terrain, elle a en particulier besoin de missiles à plus longue portée comme les ATACMS. Plus les capitales occidentales attendront avant de les lui fournir, ce qu'elles finiront sans doute par faire comme l'a laissé entendre le Royaume-Uni, plus longue et plus meurtrière sera la guerre.