Mardi 11 octobre, une seconde journée de bombardements russes de cibles et infrastructures ukrainiennes a succédé à la première, vengeance directe de l'humiliante attaque contre le pont de Crimée le week-end précédent.
Les projectiles, dans un pays où Moscou n'a pas réussi à imposer sa supériorité aérienne, sont des armes précieuses sur le plan tactique et stratégique. Ils sont aussi un gouffre financier: selon Forbes, la seule attaque de lundi aurait coûté entre 400 et 700 millions de dollars. En outre, l'Occident a vivement réagi à la vague d'attaques des derniers jours, décidant d'accélérer sa fourniture de défense anti-aériennes modernes (Nasams ou Iris-T).
La Russie peut-elle alors longtemps tenir ce rythme, ou est-elle en train d'épuiser ses dernières forces, ou presque? Bien qu'elle ait commencé à utiliser de vieux Kh-22 ou des missiles conçus pour d'autres utilisations, comme le S-300, ses stock de missiles modernes (Kalibr, Iskander, Kh-101, entre autres) se réduisent comme peau de chagrin.
Frappée de plein fouet par les sanctions industrielles occidentales, notamment sur les indispensables composants électroniques modernes, elle peine à en produire de nouveaux, modernes, précis et efficaces. Interrogé par The War Zone, un expert estimait ainsi qu'elle ne pouvait fabriquer que trois à quatre nouveaux Kh-101 par mois.
Le Kremlin s'est donc déjà tourné vers Téhéran, en passant commande de centaines, voire de milliers de drones –notamment les peu coûteux Shahed-136, dits «suicides» et utilisables en essaims, qui pleuvent sur les villes ukrainiennes. Selon Volodymyr Zelensky, ce sont ainsi 2.400 de ces appareils qui auraient été commandés par la Russie à l'Iran.
Zelensky, asking Ukrainians to remain in shelters after a tough morning, says terrorists "launched dozens of missile from Iranian Shahed drones" targeting energy facilities throughout the country… and people, goals specially chosen to cause as much damage as possible." pic.twitter.com/TSzol7rT9q
— Noga Tarnopolsky (@NTarnopolsky) October 10, 2022
Téhéran #Iran déclare ne pas avoir fourni et ne pas avoir l'intention de fournir d'armes à la Russie pour la guerre en #Ukraine Pourtant, à Bila Tserkva mercredi un soldat m'a confié cette photo de débris de drone kamikaze Geran-2 (Shahed-136), six se sont écrasés sur une caserne pic.twitter.com/mha4nYIrP3
— Stéphane Siohan (@stefsiohan) October 7, 2022
Frères d'armes
L'Iran, qui fournit déjà des drones à Moscou, pourrait-il également suppléer ses faiblesses industrielles et lui vendre des missiles? C'est la question théorique que pose The War Zone, et de sa réponse pourrait dépendre la suite de la guerre en Ukraine et un sursaut de puissance pour la Russie.
Des missiles, l'Iran en possède des tonnes. De tous les types (de croisière, balistiques, etc.), de toutes les portées, une panoplie que Moscou peut sans doute regarder avec une certaine envie.
Du Qiam-1 (portée de 700 à 800 kilomètres) au Fateh-110 (portée de 200 à 300 kilomètres) jusqu'au Soumar de croisière (portée jusqu'à 3.000 kilomètres), Téhéran dispose de nombreux modèles, du savoir-faire pour les produire et de l'expérience pour les utiliser, notamment en Irak ou contre l'Arabie saoudite –les rebelles houthis ont notamment lancé un Quds-2 contre une usine d'Aramco à Djeddah en mars 2021.
Le pays franchira-t-il le pas d'une fourniture à la Russie de certains de ces missiles? Selon The War Zone, rien n'est impossible: l'apport de cash serait précieux pour Téhéran qui, en plein bras de fer sur la question nucléaire, aurait également l'occasion de montrer à la face du monde sa compétence technologique militaire grandissante.