C'est l'un des feuilletons les plus haletants depuis le début de la guerre: largement débordée en nombre mais certainement pas en compétence pas son ennemie russe dans les airs, l'Ukraine réclame avec la plus grande des instances aux pays qui souhaitent la soutenir de lui fournir urgemment des avions de chasse et bombardiers.
Si quelques pays, notamment la Pologne ou la Slovaquie, ont semble-t-il tenté d'accéder à la requête de Kiev, la chose avait fini par bizarrement capoter, la Maison-Blanche semblant mettre son véto face à un tel transfert d'armes, sans doute par crainte de faire dépasser la température d'ébullition du Kremlin.
Nouvel épisode haletant hier, et drôle de semi-revirement. Alors que la bataille pour le Donbass a débuté et que les ultimes soldats de Marioupol résistent héroïquement dans le dédale de l'usine Azovstal, le porte-parole du Pentagone John Kirby annonçait lors d'une conférence de presse, de manière un peu confuse, que l'Ukraine «avait reçu des appareils supplémentaires».
Comme une trainée de poudre, l'information était largement reprise partout dans le monde: le Président Zelensky voyait ses vœux enfin exaucés. Sauf que. Ces articles publiés à la hâte ont dû être rapidement repris: quelques heures plus tard, les forces armées ukrainiennes elles-mêmes tweetaient que non, officiellement, elles n'avaient pas reçu de nouveaux avions ou hélicoptères.
Officially
— Ukrainian Air Force (@KpsZSU) April 20, 2022
Ukraine did not receive new aircraft from partners!
With the assistance of the US Government, @KpsZSU received spare parts and components for the restoration and repair of the fleet of aircraft in the Armed Forces, which will allow to put into service more equipment.
Mais dans le même message, l'armée de l'air ukrainienne confirmait ce que John Kirby a dû reprendre lui-même un peu plus tard: avec l'aide du Pentagone, Kiev avait bien mis la main sur des pièces détachées destinées à ses appareils déjà en service.
En kit
Un pis aller? Peut-être, mais une nouvelle qui pourtant a son importance. Car ces pièces détachées, comme l'explique également le tweet de l'Ukrainian Air Force, pourraient permettre au pays de faire voler vingt appareils de plus sous ses couleurs et dans ses cieux –cela semble peu mais, dans la disette aéronautique qui est la sienne, c'est beaucoup.
«Ils ont, au moment où nous parlons, plus d'avions disponibles qu'ils n'en avaient deux semaines auparavant», s'est ensuite corrigé le Pentagone, par la voix (changeante) de son porte-parole. «Et ce n'est pas par accident, mais parce que d'autres nations qui ont de l'expérience avec ce type d'appareils ont pu les aider à remettre ces avions en état et dans les airs.»
La ligne rouge d'un transfert direct d'avions complets et en état de marche des pays de l'Otan vers l'Ukraine ne semble donc pas avoir été effacée. Pas celle de pièces détachées arrivant pour des avions cloués au sol, voire qui sait –et les formulations alambiquées de John Kirby pourraient le laisser entendre– d'avions presque complets arrivant en kit.
Sans même parler de l'éventualité certes peu probable de MiG-29 ou Su-27 de l'ouest passés sous le manteau à l'est, c'est sans doute un pas important pour Kiev, sa défense de ce qui lui reste du Donbass ou des attaques de missiles contre le reste du pays.