Parce qu'elles font pleuvoir des petites bombes qui, si elles échouent à exploser –ce qui leur arrive souvent–, font peser des risques majeurs sur les populations locales, surtout les enfants qui peuvent les prendre pour des jouets, les armes à sous-munitions figurent sans doute parmi les plus «sales» des guerres modernes.
Condamnées depuis des lustres par toutes les associations humanitaires, telles que Human Rights Watch, le Comité International de la Croix-Rouge ou Amnesty International pour ne citer qu'elles, elles ont causé de terribles drames sur de nombreux terrains, au Yémen comme dans la Syrie d'un Bachar el-Assad appuyé par Moscou.
En Ukraine, le Kremlin en fait un usage immodéré et attesté sur le champ de bataille mais aussi en zones urbaines, les laissant tomber sur des villes, des hôpitaux, des écoles ou des jardins d'enfants. Des attaques directes «pouvant constituer des crimes de guerre», selon les Nations unies.
All elements for ID-ing and attributing a Russian cluster munition rocket attack: submunition duds ✅ remnant of carrier✅ time of attack video ✅ splatters in asphalt from submunition detonation ✅ chopped steel rod fragment embedded in car ✅ pic.twitter.com/6XfVV78Ffk
— Mark Hiznay (@MarkHiznay) March 4, 2022
#Ukraine - An expert of the prosecutor's office examining collected remnants of shells and missiles used by the Russian army to attack the second largest Ukrainian city of Kharkiv, amid the Russian invasion of Ukraine.
— AFP Photo (@AFPphoto) December 8, 2022
📸 Aleksey FILIPPOV / AFP pic.twitter.com/Na7x0KK3ui
Exemple à Kharkiv d’utilisation d’armes à sous-munitions par la Russie. (#clustermunition)
— Stéphane Kenech (@stephanekenech) August 25, 2022
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La Russie n'est pas la seule à y avoir recours: dans le conflit déclenché par Moscou, Kiev n'est pas exempte de l'utilisation d'armes à sous-munitions –de manière néanmoins mieux ciblée, visant les personnels militaires russes. Car si elles sont un drame pour les populations civiles, ces bombes à pluies de sous-bombes sont aussi des armes redoutables sur le champ de bataille, notamment contre des concentrations de personnels et d'équipements militaires.
Du fait de leurs évidents défauts et des dangers durables qu'elles font planer sur le terrain, parfois des années après leur chute, les armes à sous-munitions sont concernées par une convention interdisant leur utilisation. Plus d'une centaine de pays en sont signataires, et nombre d'entre eux ont détruit leurs stocks ou cessé de les fabriquer.
Mais pas l'Ukraine donc, et, plus curieusement, les États-Unis non plus. Kiev le sait, et sait également que Washington, qui ne les utilise plus et a commencé à s'en débarrasser, dispose encore de stocks importants de ces armes à sous-munitions, qui prennent la poussière dans des entrepôts militaires.
Dossier explosif
Malgré la sensibilité morale et internationale de la question, CNN révèle que l'Ukraine réclame discrètement, depuis des mois, à Washington de lui envoyer, ces armes autrement destinées à la casse, en plus des armes et munitions classiques que les États-Unis lui transfèrent par millions.
Confirmée au média américain par de multiples sources du côté de Washington comme de Kiev, la demande est sans doute la plus délicate –avec celle d'armes à longue portée, ces ATACMS que les Himars bridés par les États-Unis ne peuvent lancer– depuis le début du conflit déclenché en février par la Russie.
Pourtant, selon CNN, si Washington n'a pas cédé au lobbying semble-t-il intense et répété des autorités ukrainiennes, l'administration Biden n'a pas non plus définitivement dit non, bien qu'un oui semble à ce stade peu probable. Ces armes que les Américains n'utilisent et n'utiliseront pas, expliquent les officiels ukrainiens, pourraient par exemple complémenter ou remplacer ceux prélevés sur les stocks stratégiques, dangereusement bas selon certains.
Parce qu'elles sont redoutables sur le terrain et qu'elles pourraient être lancées à bonne distance par les Himars dont les armées ukrainiennes disposent, elles pourraient efficacement appuyer la défense voire les contre-offensives de Kiev, là où les combats sont les plus violents et les situations les plus critiques, comme autour de Bakhmout.
«C'est extrêmement important, d'abord parce que cela pourrait réellement changer la situation sur le champ de bataille», milite ainsi Oleksiy Hontcharenko, un législateur ukrainien, auprès de CNN. «Avec ces armes, l'Ukraine mettrait fin à cette guerre beaucoup plus rapidement, ce serait bénéfique pour tout le monde.»
«Les Russes utilisent des armes à sous-munitions contre nous, tempête quant à elle l'une des autres sources interrogées par CNN. Les États-Unis s'inquiètent des dommages collatéraux, mais nous les utiliserons sur des soldats russes, pas sur la population civile.»