Près de quarante-huit heures après les faits, il reste difficile d'affirmer que les revendications glorieuses sont avérées. Mais si elles le sont, c'est un coup significatif porté au flanc russe, en particulier dans son arrière-cour biélorusse et contre ses capacités de surveillances des activités aériennes en Ukraine.
Selon notamment l'opposition du pays, mais The War Zone indique que l'information a depuis été confirmée par des blogueurs militaires russes, des partisans biélorusses auraient réussi à endommager dimanche, peut-être très sérieusement, un Beriev A-50 (code OTAN «Mainstay») des forces aériennes du Kremlin. L'appareil était basé dans l'aérodrome de Machulishchy, à quelques courtes encablures de Minsk.
«L'un des neufs Awacs [pour «Airborne Warning and Control System», soit «système de détection et de commandement aéroporté»] des forces aériennes russes, valant 330 millions de dollars, a été touché», a ainsi déclaré le groupe responsable de l'attaque, nommé «Bypol», comme l'a rapporté le Guardian.
«C'étaient des drones. Les participants à l'opération sont biélorusses. Ils ont atteint la victoire, et sont désormais en sécurité en dehors du pays. Tout le monde a pu s'échapper», ajoute le communiqué publié par Bypol sur sa chaîne Telegram, tout en précisant que l'aéronef touché «ne va clairement voler nulle part».
Selon Alexander Azarov, à la tête de Bypol, l'attaque serait en préparation depuis des mois et deux explosions auraient touché les parties avant et centrale du A-50, celles entourées de rouge dans le tweet ci-dessous, endommageant l'avionique et l'antenne radar de l'appareil.
🔴#Bélarus : explosion 💥 sur un aérodrome militaire Machulishchi près de Minsk : un avion 🇷🇺 de détection Beriev A-50 attaqué par 2 drones.
— Andreï VAITOVICH (@andreivaitovich) February 26, 2023
Les auteurs des faits sont des opposants du régime, ils ont réussi à fuir et se trouvent à l’étranger, selon Bypol (ex-flics en exil). pic.twitter.com/5W0TPnKBqu
Now this is big. Belarusian Partisans reportedly blew up a Russian A-50 early warning and control aircraft at Machulishchy airfield near Minsk. According to the Bypol initiative, the front and central parts of the plane, avionics and radar antenna were damaged. pic.twitter.com/IGFAx00973
— Tadeusz Giczan (@TadeuszGiczan) February 26, 2023
Sentinelle
WarGonzo, blogueur militaire russe, compare l'attaque à celles, spectaculaires et loin derrière la frontière russe, qui avaient touché les aérodrome d'Engels et de Riazan début décembre 2022.
Et ainsi que l'explique The War Zone, le coup est notable à plusieurs égards. Le premier est technique: avion-radar et de commandement, le A-50 est un atout maître dans la botte du Kremlin.
Équivalent russe du Boeing E-3 Sentry déployé par nombre de pays membres de l'OTAN, il permet la surveillance «par le haut» des activités aériennes ennemies: contrairement aux radars au sol, il peut mieux détecter les aéronefs volant à basse altitude, ce qui est le mode opératoire principal des jets et hélicoptères ukrainiens.
Surtout, il est un atout des plus rares et demandés. Alors que le programme de son successeur, le A-100, est à l'arrêt, notamment du fait des sanctions imposées à la Russie par l'Occident, il n'existe que quelques exemplaires du A-50 capables aujourd'hui de mener des missions, dont l'un des appareils déployés en Syrie. Mettre l'un de ces A-50 à l'arrêt, même pour un temps, est donc une réussite significative.
En outre, le fait que l'attaque se soit produite en Biélorussie prouve que les réseaux de résistance du pays, très actifs même avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie, par exemple avec une intense «bataille du rail» menée pour mettre du sable dans les rouages du Kremlin, sont encore prêts à frapper.
In Minks, Belarus inhabitants raised the Ukrainian flag. pic.twitter.com/YccHRYgCz9
— NOËL 🇪🇺 🇺🇦 (@NOELreports) February 24, 2023
Tout comme le sont les drones ou les unités de sabotage ukrainien dont le bataillon Bratstvo. En attendant d'éventuelles armes à longue portée, notamment les ATACMS, que les États-Unis rechignent à offrir à l'Ukraine mais que la Grande-Bretagne pourrait se charger d'envoyer à Kiev, c'est un signe supplémentaire pour le Kremlin qu'il ne peut être tranquille nulle part. Pas même chez lui ou chez ses alliés les plus proches.